20 novembre 2010 6 20 /11 /novembre /2010 10:32

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Saint Jean-Marie Vianney, curé d’Ars, le 5 août 2009.

 

Chers frères et sœurs,

 

Dans la catéchèse d'aujourd'hui, je voudrais reparcourir brièvement l'existence du Saint curé d'Ars en soulignant certains traits de celle-ci, qui peuvent servir d'exemple aux prêtres de notre époque, assurément différente de celle où il vécut, mais marquée, sous de nombreux aspects, par les mêmes défis humains et spirituels fondamentaux. C'est précisément hier que l'on fêtait les 150 ans de sa naissance au ciel : il était en effet deux heures du matin le 4 août 1859, lorsque Saint Jean-Baptiste Marie Vianney, au terme de son existence terrestre, alla à la rencontre du Père céleste pour recevoir en héritage le royaume préparé depuis la Création du monde pour ceux qui suivent fidèlement ses enseignements (cf. Mt 25, 34). Quelle grande fête il dut y avoir au Paradis pour l'arrivée d'un pasteur si zélé! Quel accueil doit lui avoir réservé la multitude des fils réconciliés avec le Père, grâce à son œuvre de curé et de confesseur! J'ai voulu saisir l'occasion de cet anniversaire pour proclamer l'Année sacerdotale qui, comme on le sait, a pour thème : « Fidélité du Christ, fidélité du prêtre ». C'est de la sainteté que dépend la crédibilité du témoignage et, en définitive, l'efficacité même de la mission de chaque prêtre.

 

Jean-Marie Vianney naquit dans le petit village de Dardilly le 8 mai 1786, dans une famille de paysans, pauvre en biens matériels, mais riche d'humanité et de foi. Baptisé, comme le voulait le bon usage à l'époque, le jour même de sa naissance, il consacra les années de l'enfance et de l'adolescence aux travaux dans les champs et à paître les animaux, si bien qu'à l'âge de dix-sept ans, il était encore analphabète. Mais il connaissait par cœur les prières que lui avait enseignées sa pieuse mère et il se nourrissait du sentiment religieux que l'on respirait chez lui. Les biographes racontent que, dès sa prime jeunesse, il essaya de se conformer à la divine volonté même dans les tâches les plus humbles. Il nourrissait dans son âme le désir de devenir prêtre, mais il ne lui fut pas facile de le satisfaire. Il parvint en effet à l'ordination sacerdotale après de nombreuses adversités et incompréhensions, grâce à l'aide de sages prêtres, qui ne s'arrêtèrent pas à considérer ses limites humaines, mais surent regarder au-delà, devinant l'horizon de sainteté qui se profilait chez ce jeune homme véritablement singulier. Ainsi, le 23 juin 1815, il fut ordonné diacre et le 13 août suivant, prêtre. Enfin, à l'âge de 29 ans, après de nombreuses incertitudes, un certain nombre d'échecs et beaucoup de larmes, il put monter sur l'autel du Seigneur et réaliser le rêve de sa vie.

 

Le Saint curé d'Ars manifesta toujours une très haute considération du don reçu. Il affirmait : "Oh! Quelle grande chose que le sacerdoce! On ne le comprendra bien qu'une fois au Ciel... Si on le comprenait sur la terre, on mourrait, non d'effroi mais d'amour!". En outre, dans son enfance, il avait confié à sa mère : "Si j'étais prêtre, je voudrais conquérir beaucoup d'âmes". Et il en fut ainsi. Dans le service pastoral, aussi simple qu'extraordinairement fécond, ce curé anonyme d'un village isolé du sud de la France parvint si bien à s'identifier à son ministère, qu'il devint, également de manière visible et universellement reconnaissable, alter Christus, image du Bon Pasteur, qui à la différence du mercenaire, donne la vie pour ses brebis (cf. Jn 10, 11). A l'exemple du Bon Pasteur, il a donné la vie au cours des décennies de son service sacerdotal. Son existence fut une catéchèse vivante, qui trouvait une efficacité toute particulière lorsque les personnes le voyaient célébrer la Messe, s'arrêter en adoration devant le tabernacle ou passer de longues heures dans le confessionnal.

 

Au centre de toute sa vie, il y avait donc l'Eucharistie, qu'il célébrait et adorait avec dévotion et respect. Une autre caractéristique fondamentale de cette extraordinaire figure sacerdotale, était le ministère assidu des confessions. Il reconnaissait dans la pratique du sacrement de la pénitence l'accomplissement logique et naturel de l'apostolat sacerdotal, en obéissance au mandat du Christ : "Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis, ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus" (cf. Jn 20, 23). Saint Jean-Marie Vianney se distingua donc comme un confesseur et maître spirituel excellent et inlassable. En passant d'un même mouvement intérieur, de l'autel au confessionnal, où il passait une grande partie de la journée, il cherchait par tous les moyens, par la prédication et par le conseil persuasif, à faire redécouvrir aux paroissiens la signification et la beauté de la pénitence sacramentelle, en la montrant comme une exigence intime de la Présence eucharistique (cf. Lettre aux prêtres pour l'Année sacerdotale).

 

Les méthodes pastorales de Saint Jean-Marie Vianney pourraient apparaître peu adaptées aux conditions sociales et culturelles actuelles. Comment en effet un prêtre d'aujourd'hui pourrait-il l'imiter, dans un monde qui a tant changé? S'il est vrai que les temps changent et que de nombreux charismes sont typiques de la personne, et donc inimitables, il y a toutefois un style de vie et un élan de fond que nous sommes tous appelés à cultiver. A bien y regarder, ce qui a rendu saint le curé d'Ars a été son humble fidélité à la mission à laquelle Dieu l'avait appelé ; cela a été son abandon constant, empli de confiance, entre les mains de la Providence divine. Il a réussi à toucher le cœur des personnes non en vertu de ses dons humains, ni en s'appuyant exclusivement sur un effort, même louable, de la volonté ; il a conquis les âmes, même les plus réfractaires, en leur communiquant ce qu'il vivait de manière intime, à savoir son amitié avec le Christ. Il fut "amoureux" du Christ, et le vrai secret de son succès pastoral a été l'amour qu'il nourrissait pour le Mystère eucharistique, annoncé, célébré et vécu, qui est devenu amour pour le troupeau du Christ, les chrétiens et pour toutes les personnes qui cherchent Dieu. Son témoignage nous rappelle, chers frères et sœurs, que pour chaque baptisé, et plus encore pour le prêtre, l'Eucharistie n'est pas simplement un événement avec deux protagonistes, un dialogue entre Dieu et moi. La Communion eucharistique tend à une transformation totale de notre propre vie. Elle ouvre avec force le ‘moi’ tout entier de l'homme et crée un nouveau ‘nous’.

 

Alors, loin de réduire la figure de Saint Jean-Marie Vianney à un exemple, même admirable, de la spiritualité dévotionnelle du XIXe siècle, il est nécessaire au contraire de saisir la force prophétique qui distingue sa personnalité humaine et sacerdotale d'une très grande actualité. Dans la France post-révolutionnaire qui faisait l'expérience d'une sorte de "dictature du rationalisme" visant à effacer la présence même des prêtres et de l'Eglise dans la société, il vécut, d'abord – pendant sa jeunesse – une clandestinité héroïque en parcourant des kilomètres dans la nuit pour participer à la Messe. Puis – comme prêtre – il se distingua par une créativité pastorale singulière et féconde, en mesure de montrer que le rationalisme, qui régnait alors sans partage, était en réalité loin de satisfaire les authentiques besoins de l'homme et qui, en définitive, n'était pas vivable.

 

Chers frères et sœurs, à 150 ans de la mort du Saint curé d'Ars, les défis de la société d'aujourd'hui ne sont pas moins difficiles, ils sont même devenus peut-être plus complexes. Si à l'époque régnait la "dictature du rationalisme", à l'époque actuelle, on note dans de nombreux milieux, une sorte de "dictature du relativisme". Elles apparaissent toutes deux comme des réponses inadaptées au juste besoin de l'homme d'utiliser pleinement sa propre raison comme élément distinctif et constitutif de son identité. Le rationalisme fut inadapté parce qu'il ne tint pas compte des limites humaines et prétendit élever la seule raison comme mesure de toute chose, en la transformant en déesse ; le relativisme contemporain mortifie la raison, parce que, de fait, il en vient à affirmer que l'être humain ne peut rien connaître avec certitude au-delà du domaine scientifique positif. Mais aujourd'hui, comme alors, l'homme "assoiffé de signification et d'accomplissement" va à la recherche constante de réponses exhaustives aux questions de fond qu'il ne cesse de se poser.

 

Les Pères du Concile œcuménique Vatican II avaient bien présents à l'esprit cette "soif de vérité" qui brûle dans le cœur de tout homme, lorsqu'ils affirmèrent que c'est aux prêtres, "comme éducateurs de la foi", qu'il revient de former "une authentique communauté chrétienne" capable de "frayer la route à tous les hommes vers le Christ" et d'exercer"une véritable maternité" à leur égard, en indiquant ou en facilitant à celui qui ne croit pas"un chemin vers le Christ et son Eglise" et "pour réveiller les fidèles, les nourrir, leur donner des forces pour le combat spirituel" (cf. Presbyterorum ordinis, n. 6). L'enseignement que continue de nous transmettre le Saint curé d'Ars à cet égard est que, à la base de cet engagement pastoral, le prêtre doit placer une union personnelle intime avec le Christ, qu'il faut cultiver et accroître jour après jour. C'est seulement s'il est amoureux du Christ que le prêtre pourra enseigner à tous cette union, cette amitié intime avec le divin Maître, qu'il pourra toucher les cœurs des personnes et les ouvrir à l'amour miséricordieux du Seigneur. C'est seulement ainsi, par conséquent, qu'il pourra transmettre enthousiasme et vitalité spirituelle aux communautés que le Seigneur lui confie.

 

Prions pour que, par l'intercession de Saint Jean-Marie Vianney, Dieu fasse don à son Eglise de saints prêtres, et pour que croisse chez les fidèles le désir de soutenir et d'aider leur ministère. Confions ces intentions à Marie, que nous invoquons précisément aujourd'hui comme Notre Dame des Neiges.

 

 

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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 00:00

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur l’Année sacerdotale, le 1er juillet 2009.

 

Chers frères et sœurs,

 

Avec la célébration des premières Vêpres de la solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs, s'est conclue, comme vous le savez, le 28 juin, l'Année paulinienne, en souvenir du deuxième millénaire de l'Apôtre des Nations. Nous rendons grâce au Seigneur pour les fruits spirituels que cette importante initiative a apportés dans de nombreuses communautés chrétiennes. En tant que précieux héritage de l'Année paulinienne, nous pouvons accueillir l'invitation de l'Apôtre à approfondir la connaissance du mystère du Christ, afin qu'il soit le cœur et le centre de notre existence personnelle et communautaire. En effet, telle est la condition indispensable pour un véritable renouveau spirituel et ecclésial. Comme je l'ai déjà souligné lors de la première célébration eucharistique dans la chapelle Sixtine après mon élection comme successeur de l'Apôtre Pierre, c'est précisément dans la pleine communion avec le Christ que "naît tout autre élément de la vie de l'Eglise, en premier lieu la communion entre tous les fidèles, l'engagement d'annoncer et de témoigner l'Evangile, l'ardeur de la charité envers tous, et en particulier envers les pauvres et les petits". Cela vaut en premier lieu pour les prêtres. C'est pourquoi nous remercions la Divine Providence de Dieu qui nous offre à présent la possibilité de célébrer l'Année sacerdotale. Je souhaite de tout cœur que celle-ci constitue pour chaque prêtre une occasion de renouveau intérieur et, par conséquent, de renforcement solide dans l'engagement pour sa propre mission.

 

De même que pendant l'Année paulienne, notre référence constante a été Saint Paul, ainsi, au cours des prochains mois, nous nous tournerons en premier lieu vers Saint Jean-Marie Vianney, le Saint curé d'Ars, en rappelant le 150e anniversaire de sa mort. Dans la lettre que j'ai écrite aux prêtres pour cette occasion, j'ai voulu souligner ce qui resplendit le plus dans l'existence de cet humble ministre de l'autel : "sa totale identification à son ministère". Il aimait dire qu'"un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de Dieu, c'est là le plus grand trésor que le bon Dieu puisse accorder à une paroisse et un des plus précieux dons de la miséricorde divine". Et, comme s'il n'arrivait pas à croire à la grandeur du don et du devoir qui avaient été confiés à une pauvre créature humaine, il soupirait : "Oh! que le prêtre est quelque chose de grand!... S'il se comprenait, il mourrait... Dieu lui obéit : il dit deux mots et Notre Seigneur descend du ciel à sa voix et se renferme dans une petite hostie".

 

En vérité, en considérant précisément le binôme "identité-mission", chaque prêtre peut mieux ressentir la nécessité de cette identification avec le Christ qui lui garantit la fidélité et la fécondité du témoignage évangélique. L'intitulé même de l'Année sacerdotaleFidélité du Christ, fidélité du prêtre – souligne que le don de la grâce divine précède toute possible réponse humaine et réalisation pastorale, et ainsi dans la vie du prêtre, annonce missionnaire et culte sont inséparables, de même que ne peuvent jamais être séparées identité ontologique-sacramentelle et mission évangélisatrice. D'ailleurs, l'objectif de la mission de chaque prêtre, pourrions-nous dire, est "cultuelle" : afin que tous les hommes puissent s'offrir à Dieu comme hostie vivante, sainte et agréable à Dieu (cf. Rm 12, 1), qui dans la Création même, dans les hommes, devient culte, louange du Créateur, en recevant la charité qu'ils sont appelés à dispenser en abondance les uns aux autres. On le percevait clairement aux débuts du christianisme. Saint Jean Chrysostome disait, par exemple, que le sacrement de l'autel et le "sacrement du frère" ou, comme il dit, le "sacrement du pauvre", constituent deux aspects du même mystère. L'amour pour le prochain, l'attention à la justice et aux pauvres ne sont pas seulement des thèmes d'une morale sociale, mais plutôt l'expression d'une conception sacramentelle de la moralité chrétienne car, à travers le ministère des prêtres, s'accomplit le sacrifice spirituel de tous les fidèles, en union avec celui du Christ, unique Médiateur : sacrifice que les prêtres offrent de façon non sanglante et sacramentelle dans l'attente de la nouvelle venue du Seigneur. Telle est la dimension principale, essentiellement missionnaire et dynamique, de l'identité et du ministère sacerdotal : à travers l'annonce de l'Evangile, ils suscitent la foi chez ceux qui ne croient pas encore, afin qu'ils puissent unir leur sacrifice au sacrifice du Christ, qui se traduit en amour pour Dieu et pour le prochain.

 

Chers frères et sœurs, face à tant d'incertitudes et de difficultés, notamment dans l'exercice du ministère sacerdotal, il est urgent de retrouver un jugement clair et sans équivoque sur le primat absolu de la grâce divine, en rappelant ce qu'écrit Saint Thomas d'Aquin : "Le plus petit don de la grâce dépasse le bien naturel de tout l'univers" (Summa Theologiae, I-II, q. 113, a. 9, ad 2). La mission de chaque prêtre dépendra donc également et surtout de la conscience de la réalité sacramentelle de son "nouvel être". De la certitude de son identité, non pas construite de manière artificielle, mais donnée et écoutée gratuitement et divinement, dépend l'enthousiasme toujours renouvelé du prêtre pour la mission. Ce que j'ai écrit dans l'Encyclique Deus caritas est vaut également pour les prêtres : "A l'origine du fait d'être chrétien il n'y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive" (n. 1).

 

Ayant reçu un don de grâce aussi extraordinaire par leur "consécration", les prêtres deviennent les témoins permanents de leur rencontre avec le Christ. En partant précisément de cette conscience intérieure, ils peuvent accomplir pleinement leur "mission", à travers l'annonce de la Parole et l'administration des sacrements. Après le Concile Vatican II, on a eu parfois l'impression que, dans la mission des prêtres à notre époque, il y avait quelque chose de plus urgent ; certains pensaient que l'on devait en premier lieu édifier une société différente. La page évangélique que nous avons écoutée au début, rappelle en revanche les deux éléments essentiels du ministère sacerdotal. Jésus envoie, à cette époque et aujourd'hui, les apôtres pour annoncer l'Evangile et leur donne le pouvoir de chasser les mauvais esprits. "Annonce" et "pouvoir", c'est-à-dire "parole" et "sacrement" sont donc les deux piliers fondamentaux du service sacerdotal, au-delà de leurs multiples configurations possibles.

 

Lorsqu'on ne tient pas compte du "diptyque" consécration-mission, il devient véritablement difficile de comprendre l'identité du prêtre et de son ministère dans l'Eglise. En effet, qui est le prêtre, sinon un homme converti et renouvelé par l'Esprit, qui vit de la relation personnelle avec le Christ, faisant constamment siens les critères évangéliques? Qui est le prêtre, sinon un homme d'unité et de vérité, conscient de ses limites et, dans le même temps, de la grandeur extraordinaire de la vocation reçue, c'est-à-dire celle de contribuer à étendre le Royaume de Dieu jusqu'aux extrémités de la terre? Oui! Le prêtre est un homme qui appartient entièrement au Seigneur, car c'est Dieu lui-même qui l'a appelé, et l'a constitué dans son service apostolique. Et précisément en appartenant totalement au Seigneur, il appartient totalement aux hommes, il est totalement pour les hommes.

 

Au cours de cette Année sacerdotale, qui se prolongera jusqu'à la prochaine solennité du Très Saint-Cœur de Jésus, prions pour tous les prêtres (…). La prière est le premier engagement, le véritable chemin de sanctification des prêtres, et l'âme de l'authentique "pastorale des vocations". Le faible nombre d'ordinations sacerdotales dans certains pays non seulement ne doit pas décourager, mais doit inciter à multiplier les espaces de silence et d'écoute de la Parole, à mieux soigner la direction spirituelle et le sacrement de la confession, afin que la voix de Dieu, qui continue toujours à appeler et à confirmer, puisse être écoutée et promptement suivie par de nombreux jeunes. Celui qui prie n'a pas peur ; celui qui prie n'est jamais seul ; celui qui prie se sauve! Le modèle d'une existence faite prière est sans aucun doute Saint Jean-Marie Vianney. Que Marie, la Mère de l'Eglise, aide tous les prêtres à suivre son exemple pour être, comme lui, des témoins du Christ et des apôtres de l'Evangile.

 

 

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 00:00

Texte de la Newsletter n°11 (publiée le 14 novembre 2010) du Groupe Facebook consacré à l'oeuvre de Claude Tresmontant, l'un des plus grands métaphysiciens du siècle passé – qui réfuta magistralement l'athéisme.

 

Pour l’une des trois grandes branches de la métaphysique dans l’histoire de la pensée, le monisme idéaliste (qui se distingue du matéralisme athée et du monothéisme croyant), il existe une seule sorte d’être : l’Esprit. L’univers, le monde matériel, eux n’existent pas (au sens fort du terme) ; ou comme une simple apparence : car la véritable consistance, le véritable Être, l’Être incréé et absolu, c’est l’Esprit (ou le Brahman, ou la Substance, ou l’Un, comme on voudra).

 

Cette tradition métaphysique qui nous vient de l’Inde ancienne et des antiques Upanishad considère le monde matériel dans lequel nous vivons comme le résultat d’une chute de l’Un. Si nous vivons dans un monde où tout est désuni, où l’Un est pulvérisé en une multiplicité d’êtres qui sont autant de parcelles de l’Absolu, c’est qu’il s’est produit un drame à l’intérieur de la Divinité originelle – qui explique pourquoi l’Un n’est pas resté tranquille en lui-même.

 

La théosophie (ou la gnose) veut donner une explication à ce mystérieux évènement qui s’est produit au sein de l’Un – et qui a provoqué sa chute : elle a la « prétention [de] connaître ce qui se passait au sein de l’Être absolu avant la production du monde multiple, indépendamment de cette production » (Claude Tresmontant, Les Métaphysiques principales, p. 201).

 

Le point commun à toutes les gnoses, c’est la pensée que notre monde est le résultat d’une tragédie. Puisqu’à l’origine, il y a l’Un et lui seul, les systèmes gnostiques professent la pré-existence des âmes, leur divinité originelle et leur persistance après la mort ; leur migration de corps en corps, jusqu’à leur retour dans l’Un d’où ils sont issus et dont ils constituent une parcelle. Et puisque dans notre expérience, nous observons une multiplicité d’êtres, la théosophie enseigne la chute de l’Âme originelle dans des corps mauvais, dans un monde mauvais et une matière mauvaise. Pour la gnose et la théosophie, « le mal est antérieur à l’existence concrète puisqu’il en est la cause. Mettre la tragédie à l’origine du monde, c’est l’un des signes, l’un des caractères de la gnose. » (Claude Tresmontant, Les Métaphysiques principales, p. 202 et 203).

 

A l’origine de notre Univers, il n’y a pas, selon la gnose, un Dieu bon et Créateur – mais au contraire, le Mal ; c’est lui qui a enfanté l’univers et tout ce qui le constitue – vous, moi. Le Principe de l’être de l’Univers, c’est le Mal, la division, la guerre, la tragédie. « Cela nous rappelle les antiques mythologies égyptiennes, sumériennes, akkadiennes, babyloniennes, etc. qui nous racontent la genèse des dieux à partir du Chaos originel, et les massacres que les dieux s’infligent les uns aux autres. Le thème théogonique issu de ces antiques mythologies se retrouve dans la Kabbale – qui est la gnose habillée de théologie hébraïque » (Claude Tresmontant, Les Métaphysiques principales, p. 202, 203 et 208).

 

Hegel reprendra ces thèmes théosophiques en 1807 dans sa « Phénoménologie de l’Esprit » qui retrace « la genèse tragique de l’Absolu qui ne se réalise, qui n’accède à la conscience de Soi, à sa vérité, qu’en passant par le déchirement, l’exil, l’aliénation que constitue pour lui la production du monde, nécessaire à sa propre genèse » (Claude Tresmontant, Les Métaphysiques principales, p. 209).

 

Le philosophe allemand Schelling, nourri de la Kabbale dans sa jeunesse, enseignera que  « lorigine du monde sensible nest pensable que comme une rupture intégrale par rapport àl’Être absolu, par un saut. Cest au sens propre une catastrophe. Le fondement des choses de notre expérience sensible ne peut consister que dans un éloignement, une chute par rapport à lAbsolu. Lorigine du monde sensible ne résulte pas dune Création, comme un don positif issu de lAbsolu, mais bien au contraire dune chute à partir de lAbsolu. Lunivers physique nest [donc] quun accident par rapport à lAbsolu. » (Claude Tresmontant, Les Métaphysiques principales, p. 192).

 

 

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16 novembre 2010 2 16 /11 /novembre /2010 12:25

Extrait de l’Audience Générale du Pape Benoît XVI sur l’Année du sacerdoce, le 24 juin 2009.

 

Chers frères et sœurs,

 

Vendredi dernier, en la solennité du Sacré-Cœur de Jésus et journée traditionnellement consacrée à la prière et à la sanctification des prêtres, j'ai eu la joie d'inaugurer l'Année sacerdotale, décidée à l'occasion du 150e anniversaire de la "naissance au ciel" du curé d'Ars, Saint Jean-Baptiste Marie Vianney. Et en entrant dans la basilique vaticane pour la célébration des vêpres, presque comme premier geste symbolique, je me suis arrêté dans la chapelle du Chœur pour vénérer la relique de ce saint Pasteur d'âmes : son cœur. Pourquoi une Année sacerdotale? Pourquoi précisément en souvenir du Saint curé d'Ars, qui n'a apparemment rien accompli d'extraordinaire ?

 

La Providence divine a fait en sorte que sa figure soit rapprochée de celle de Saint Paul. En effet, alors que se conclut l'Année paulinienne, consacrée à l'Apôtre des nations, modèle extraordinaire d'évangélisateur qui a accompli plusieurs voyages missionnaires pour diffuser l'Evangile, cette nouvelle année jubilaire nous invite à nous tourner vers un pauvre agriculteur devenu un humble curé, qui a accompli son service pastoral dans un petit village. Si les deux Saints diffèrent beaucoup dans les itinéraires de vie qui les ont caractérisés – l'un est allé de région en région pour annoncer l'Evangile, l'autre a accueilli des milliers et des milliers de fidèles en restant toujours dans sa petite paroisse –, il y a cependant quelque chose de fondamental qui les rassemble : il s'agit de leur identification totale avec leur ministère, leur communion avec le Christ qui faisait dire à saint Paul : "Je vis, mais ce n'est plus moi, c'est le Christ qui vit en moi" (Ga 2, 20). Et Saint Jean-Marie Vianney aimait répéter : "Si nous avions la foi, nous verrions Dieu caché dans le prêtre comme une lumière derrière la vitre, comme le vin mélangé à l'eau". Le but de cette Année sacerdotale – comme je l'ai écrit dans la lettre envoyée aux prêtres en à cette occasion – est donc de favoriser la tension de chaque prêtre vers la perfection spirituelle de laquelle dépend en particulier l'efficacité de son ministère, et d'aider avant tout les prêtres, et avec eux tout le peuple de Dieu, à redécouvrir et à raviver la conscience de l'extraordinaire et indispensable don de Grâce que le ministère ordonné représente pour celui qui l'a reçu, pour l'Eglise entière et pour le monde, qui sans la présence réelle du Christ serait perdu.

 

Les conditions historiques et sociales dans lesquelles se trouva le curé d'Ars ont indéniablement changé et il est juste de se demander comment les prêtres peuvent l'imiter dans l'identification avec leur propre ministère dans les sociétés actuelles mondialisées. Dans un monde où la vision commune de la vie comprend toujours moins le sacré, à la place duquel l'"aspect fonctionnel" devient l'unique catégorie décisive, la conception catholique du sacerdoce pourrait risquer de perdre sa considération naturelle, parfois même à l'intérieur de la conscience ecclésiale. Souvent, que ce soit dans les milieux théologiques, ou bien dans la pratique pastorale et de formation concrète du clergé, s'affrontent, et parfois s'opposent, deux conceptions différentes du sacerdoce. Je remarquais à ce propos il y a quelques années qu'il existe d'une part, une conception socio-fonctionnelle qui définit l'essence du sacerdoce avec le concept de "service" : le service à la communauté, dans l'exercice d'une fonction... D'autre part, il y a la conception sacramentelle-ontologique, qui naturellement ne nie pas le caractère de service du sacerdoce, mais le voit cependant ancré à l'être du ministre et qui considère que cet être est déterminé par un don accordé par le Seigneur à travers la médiation de l'Eglise, dont le nom est sacrement. Le glissement terminologique du terme "sacerdoce" à ceux de "service, ministère, charge", est également le signe de cette conception différente. Ensuite, à la conception ontologique-sacramentelle, est lié le primat de l'Eucharistie, dans le binôme "sacerdoce-sacrifice", alors qu'à la deuxième correspondrait le primat de la parole et du service de l'annonce.

 

A tout bien considérer, il ne s'agit pas de deux conceptions opposées, et la tension qui existe cependant entre elles doit être résolue de l'intérieur. Ainsi, le décret Presbyterorum ordinis du Concile Vatican II affirme : "En effet, l'annonce apostolique de l'Evangile convoque et rassemble le peuple de Dieu, afin que tous les membres de ce peuple... s'offrent eux-mêmes en "victime vivante, sainte, agréable à Dieu" (Rm 12, 1) et c'est précisément à travers le ministère des prêtres que le sacrifice spirituel des fidèles atteint à sa perfection dans l'union au sacrifice du Christ, unique Médiateur. En effet ce sacrifice est offert par les mains des prêtres au nom de toute l'Eglise dans l'Eucharistie de manière non sanglante et sacramentelle, jusqu'à ce que vienne le Seigneur lui-même" (n. 2).

 

Nous nous demandons alors : "Que signifie précisément pour les prêtres évangéliser? En quoi consiste ce que l'on appelle le primat de l'annonce?". Jésus parle de l'annonce du Royaume de Dieu comme du véritable but de sa venue dans le monde et son annonce n'est pas seulement un "discours". Elle inclut dans le même temps son action elle-même : les signes et les miracles qu'il accomplit indiquent que le Royaume vient dans le monde comme réalité présente, qui coïncide en fin de compte avec sa propre personne. En ce sens, il faut rappeler que, dans le primat de l'annonce également, la parole et le signe sont inséparables. La prédication chrétienne ne proclame pas des "paroles", mais la Parole, et l'annonce coïncide avec la personne même du Christ, ontologiquement ouverte à la relation avec le Père et obéissant à sa volonté. Un service authentique à la Parole exige de la part du prêtre une profonde abnégation de soi, jusqu'à dire avec l'Apôtre : "ce n'est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi". Le prêtre ne peut pas se considérer comme "maître" de la parole, mais comme serviteur. Il n'est pas la parole mais, comme le proclamait Jean le Baptiste, dont nous célébrons précisément aujourd'hui la nativité, il est la "voix" de la Parole : "Voix de celui qui crie dans le désert: préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers" (Mc 1, 3).

 

Or, être "voix" de la Parole, ne constitue pas pour le prêtre un simple aspect fonctionnel. Au contraire, cela présuppose une substantielle "perte de soi" dans le Christ, en participant à son mystère de mort et de résurrection avec tout son moi : intelligence, liberté, volonté et offrande de son propre corps, comme sacrifice vivant (cf. Rm 12, 1-2). Seule la participation au sacrifice du Christ, à sa khènosi, rend l'annonce authentique! Tel est le chemin qu'il doit parcourir avec le Christ pour parvenir à dire au Père avec Lui : que s'accomplisse "non ce que je veux, mais ce que tu veux" (Mc 14, 36). L'annonce, alors, comporte toujours également le sacrifice de soi, condition pour que l'annonce soit authentique et efficace.

 

Alter Christus, le prêtre est profondément uni au Verbe du Père, qui en s'incarnant a pris la forme d'un serviteur, est devenu serviteur (Cf. Ph 2, 5-11). Le prêtre est le serviteur du Christ, au sens que son existence, configurée à Lui de manière ontologique, assume un caractère essentiellement relationnel : il est en Christ, pour le Christ et avec le Christ au service des hommes. Précisément parce qu'il appartient au Christ, le prêtre est radicalement au service des hommes : il est ministre de leur Salut, de leur bonheur, de leur libération authentique, mûrissant, dans cette assomption progressive de la volonté du Christ, dans la prière, dans le "cœur à cœur" avec Lui. Telle est alors la condition inaliénable de toute annonce, qui comporte la participation à l'offrande sacramentelle de l'Eucharistie et la docile obéissance à l'Eglise.

 

Le Saint curé d'Ars répétait souvent avec les larmes aux yeux : "Comme il est effrayant d'être prêtre!". Et il ajoutait : "Combien est triste un prêtre qui célèbre la Messe comme un fait ordinaire! Combien s'égare un prêtre qui n'a pas de vie intérieure!". Puisse l'Année sacerdotale conduire tous les prêtres à s'identifier totalement avec Jésus crucifié et ressuscité, pour que, à l'imitation de Saint Jean Baptiste, ils soient prêts à "diminuer" pour qu'Il grandisse ; pour qu'en suivant l'exemple du curé d'Ars, ils ressentent de manière constante et profonde la responsabilité de leur mission, qui est le signe et la présence de la miséricorde infinie de Dieu. Confions à la Vierge, Mère de l'Eglise, l'Année sacerdotale qui vient de commencer et tous les prêtres du monde.

 

 

 

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15 novembre 2010 1 15 /11 /novembre /2010 00:00

"Quelqu'un qui ne veut pas croire en Dieu sera prêt à croire en n'importe quoi."

 

(GK Chesterton, 1874-1936)

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14 novembre 2010 7 14 /11 /novembre /2010 17:00

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"Il fut un temps où l'athéisme prétendait avoir partie liée avec la science.

"Il faut bien en convenir aujourd'hui : l'athéisme a partie liée avec la mythologie et avec les philosophies de l'irrationnel.

"Ce n'est plus une philosophie, c'est l'expression d'une préférence subjective, c'est une foi irrationnelle."

(Claude Tresmontant, in L'histoire de l'Univers et le sens de la Création).

 

1 - L'athéisme n'existe pas

2 - L'athéisme : une impasse philosophique (1)

3 - L'athéisme : une impasse philosophique (2)

4 - L'athéisme : une impasse philosophique (3)

5 - L'athéisme : une impasse philosophique (4)

6 - L'univers a besoin d'un Créateur

(une esquisse de réponse au conte mythologique de Stephen Hawking)

7 - L'athéisme, ou la négation de la raison

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14 novembre 2010 7 14 /11 /novembre /2010 16:43

Extrait du Message du Pape Benoît XVI pour la Journée Mondiale des Missions 2009.

 

(…) J’invite chacun a raviver en soi la conscience du Mandat Missionnaire du Christ de faire « de toutes les nations des disciples » (Matthieu 28,19), sur les pas de Saint Paul, l’Apôtre des Nations.

 

Le but de la mission de l’Eglise est en effet d’éclairer, par la lumière de l’Evangile, tous les peuples sur leur chemin historique vers Dieu, pour qu’ils aient en Lui, leur pleine réalisation et leur plein accomplissement. Nous devons ressentir le désir profond et la passion d’éclairer tous les Peuples, par la Lumière du Christ, qui resplendit sur le visage de l’Eglise, pour que tous se rassemblent dans l’unique famille humaine, sous la paternité aimante de Dieu.

 

C’est dans cette perspective que les disciples du Christ, répandus dans le monde entier, agissent, travaillent durement, et gémissent sous le poids des souffrances, et donnent leur vie. Je réaffirme avec force tout ce qui a été dit à plusieurs reprises par mes Vénérés Prédécesseurs : l’Eglise n’agit pas pour étendre son pouvoir, ou pour affirmer sa domination, mais pour apporter à tous le Christ, Salut du monde. Nous ne demandons rien d’autre que de nous mettre au service de l’humanité, et spécialement de celle qui souffre le plus, et qui est la plus marginalisée, parce que nous croyons que « l’engagement d’annoncer l’Evangile à tous les hommes de notre temps… est sans aucun doute un service rendu non seulement à la communauté chrétienne, mais aussi à toute l’humanité » (Evangelii Nuntiandi, 1), qui « connaît des conquêtes admirables, mais semble avoir oublié le sens des réalités ultimes et de son existence même » (Redemptoris Missio, 2).

 

1. Tous les Peuples sont appelés au Salut

 

L’humanité entière, en vérité, a la vocation radicale de retourner à sa source qui est Dieu, dans Lequel seulement elle trouvera son accomplissement final par la restauration de toutes les choses dans le Christ. La dispersion, la multiplicité, le conflit, l’inimitié, seront apaisés et réconciliés par le Sang de la Croix.

 

Le nouveau début a déjà commencé avec la Résurrection et avec l’Exaltation du Christ, qui attire toutes les choses à soi, les renouvelle, les fait participer à la joie éternelle de Dieu. L’avenir de la nouvelle Création brille déjà dans notre monde, et allume, même si c’est au sein de contradictions et de souffrances, l’espérance d’une vie nouvelle. La Mission de l’Eglise consiste à « contaminer » d’espérance tous les peuples. Pour cela, le Christ appelle, justifie, sanctifie et envoie ses disciples pour annoncer le Royaume de Dieu, pour que toutes les Nations deviennent Peuple de Dieu. C’est seulement dans cette Mission que se comprend et s’authentifie le véritable chemin historique de l’humanité. La Mission universelle doit devenir une constante fondamentale de la vie de l’Eglise. Annoncer l’Evangile doit être pour nous, comme ce l’était déjà pour l’Apôtre Paul, un engagement qui ne peut être différé et qui est premier.

 

2. Eglise pèlerine

 

L’Eglise Universelle, sans limites et sans frontières, se sent responsable de l’annonce de l’Evangile vis-à-vis de peuples entiers (cf. Evangelii Nuntiandi, 53). Germe d’espérance par vocation, elle doit continuer le service du Christ pour le monde. Sa Mission et son service ne sont pas à la mesure des besoins matériels ou même spirituels qui s’achèvent dans le cadre de l’existence temporelle, mais d’un Salut transcendant qui se réalise dans le Royaume de Dieu (cf. Evangelii Nuntiandi, 27). Ce Royaume, tout en étant dans sa plénitude eschatologique, et non pas ‘de’ ce monde (cf. Jean18, 36), est aussi ‘dans’ ce monde et dans son histoire, force de justice et de paix, de vraie liberté et de respect de la dignité de tout homme. L’Eglise vise à transformer le monde par la proclamation de l’Evangile de l’Amour, « qui éclaire toujours de nouveau un monde ténébreux, et qui nous donne le courage de vivre et d’agir et… de cette manière, de faire entrer la lumière de Dieu dans le monde » (Deus Caritas est, 39). C’est à cette Mission et à ce service que, par ce Message, j’appelle également à participer tous les membres et toutes les institutions de l’Eglise.

 

3. Missio Ad Gentes

 

La Mission de l’Eglise consiste donc à appeler tous les Peuples au Salut réalisé par Dieu par l’intermédiaire de son Fils Incarné. Il est donc nécessaire de renouveler l’engagement d’annoncer l’Evangile, qui est ferment de liberté et de progrès, de fraternité, d’unité et de paix (cf. Ad Gentes, 8). Je veux « de nouveau confirmer que le Mandat d’évangéliser tous les hommes, constitue la Mission essentielle de l’Eglise » (Evangelii Nuntiandi, 14), tâche et mission que les profonds et vastes changements de la société actuelle rendent plus urgentes encore. Ce qui est en question est le Salut éternel des personnes, la fin et l’accomplissement même de l’histoire humaine et de l’univers. Animés et inspirés par l’Apôtre des Nations, nous devons être conscients que Dieu a un peuple nombreux dans toutes les villes parcourues, y compris par les apôtres d’aujourd’hui (cf. Actes 18, 10). En effet, « la promesse est pour tous ceux qui sont au loin, en aussi grand nombre que le Seigneur les appellera » (Actes 2, 39).

 

L’Eglise entière doit s’engager dans la ‘Missio Ad Gentes’ tant que la souveraineté salvifique du Christ ne sera pas pleinement réalisée. « Actuellement, nous ne voyons pas encore que tout lui soit soumis » (Hébreux 2, 8)

 

4. Appelés à évangéliser y compris par le martyre

 

En cette Journée consacrée aux Missions, je rappelle dans la prière ceux qui ont fait de leur vie une consécration exclusive au travail d’évangélisation. Une mention particulière s’adresse à ces Eglises locales et à ces missionnaires hommes et femmes qui ont à témoigner et à répandre le Royaume de Dieu dans des situations de persécution, avec des formes d’oppression qui, vont de la discrimination sociale jusqu’à la prison, à la torture et à la mort. Ils sont nombreux ceux qui, actuellement, sont mis à mort à cause de Son Nom. Ce qu’écrivait mon vénéré Prédécesseur le Pape Jean Paul II est toujours d’une actualité terrible : « La mémoire jubilaire nous a ouvert un spectacle surprenant, nous montrant que notre temps est particulièrement riche de témoins qui, d'une manière ou d'une autre, ont su vivre l'Évangile dans des situations d'hostilité et de persécution, souvent jusqu'à donner le témoignage suprême du sang ». (Novo Millenio Ineunte,  41)

 

La participation à la Mission du Christ, en effet, marque aussi la vie des annonciateurs de l’Evangile, auxquels est réservé le même destin que leur Maître. « Rappelez-vous la parole que je vous ai dite : Un serviteur n’est pas plus grand que son maître. S’ils m’ont persécuté, ils vous persécuteront aussi » (Jean 15, 20). L’Eglise se place sur la même voie, et subit le même sort que le Christ, parce qu’elle n’agit pas sur la base d’une logique humaine, ou en comptant sur les raisons de la force, mais en suivant la Voie de la Croix, et en se faisant, dans une obéissance filiale au Père, témoin et compagne de voyage de cette humanité (…).

 

5. Conclusion

 

L’élan missionnaire a toujours été signe d’une vitalité de nos Eglises (cf. Redemptoris Missio, 2). Il est nécessaire toutefois de réaffirmer que l’évangélisation est une œuvre de l’Esprit et qu’avant même d’être action, elle est témoignage et irradiation de la lumière du Christ (cf. Redemptoris Missio, 26) de la part de l’Eglise locale qui envoie ses missionnaires hommes et femmes, pour les mener au-delà de ses frontières. C’est pourquoi je demande à tous les Catholiques de prier le Saint-Esprit, pour qu’il accroisse, dans l’Eglise, la passion pour la Mission qui consiste à répandre le Royaume de Dieu, et de soutenir les missionnaires, hommes et femmes, et les communautés chrétiennes engagées en première ligne dans cette Mission, parfois dans des milieux hostiles de persécution.

 

J’invite en même temps tous les catholiques à donner un signe crédible de communion entre les Eglises, par une aide économique, spécialement dans la phase de crise que traverse l’humanité, pour mettre les jeunes Eglises locales, en condition d’éclairer les gens par l’Evangile de la charité.

 

Que la Vierge Marie, Etoile de la nouvelle Evangélisation, nous guide dans notre action missionnaire, Elle qui a donné le Christ au monde, venu comme Lumière des nations, pour qu’il apporte le Salut « jusqu’aux extrémités de la terre » (Actes 13, 47).

 

Donné au Vatican, le 29 juin 2009.

 

 

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13 novembre 2010 6 13 /11 /novembre /2010 12:43

"Loin d'être rationaliste, l'athéisme s'est au contraire formé contre la raison, notamment à partir de la critique kantien de celle-ci.


"La raison est l'ennemi de l'athéisme, parce que l'existence de Dieu est pour elle une donnée fondamentale.

 

"En détruisant la raison, la négation de Dieu ne devenait plus qu'une simple formalité." (Alexis Masson)

 

envoyé par Epistheo.

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13 novembre 2010 6 13 /11 /novembre /2010 12:14

Extrait du discours prononcé par le Pape Benoît XVI au Congrès européen pour la pastorale des vocations, le 4 juillet 2009.

 

Vous avez placé au centre de vos travaux la parabole évangélique du semeur. Avec abondance et gratuitement, le Seigneur jette la semence de la Parole de Dieu, même en sachant qu'elle rencontrera peut-être un terrain inadapté, qui ne lui permettra pas de se développer, à cause de l'aridité, ou qui en éteindra la force vitale, en l'étouffant sous les buissons épineux. Toutefois, le semeur ne se décourage pas, car il sait qu'une partie de cette semence est destinée à trouver un "bon terrain", c'est-à-dire des cœurs ardents et capables d'accueillir la Parole avec disponibilité, pour la faire mûrir dans la persévérance et en redistribuer avec générosité le fruit au bénéfice d'une multitude.

 

L'image du terrain peut évoquer la réalité plus ou moins bonne de la famille ; le milieu parfois aride et dur du travail ; les jours de la souffrance et des larmes. La terre est surtout le cœur de tout homme, en particulier des jeunes, auxquels vous vous adressez dans votre service d'écoute et d'accompagnement : un cœur souvent confus et désorienté, et pourtant capable de contenir en lui des énergies de don insoupçonnées ; prêt à s'ouvrir dans les bourgeons d'une vie donnée pour l'amour de Jésus, capable de le suivre avec la totalité et la certitude qui naît lorsque l'on a trouvé le plus grand trésor de toute l'existence. Le Seigneur est le seul et unique qui sème dans le cœur de l'homme. Ce n'est qu'après la semence abondante et généreuse de la Parole de Dieu que l'on peut s'engager sur les sentiers de l'accompagnement et de l'éducation, de la formation et du discernement. Tout cela est lié à cette petite semence, don mystérieux de la Providence céleste, qui libère une force extraordinaire. C'est en effet la Parole de Dieu qui opère en elle-même de façon efficace ce qu'elle dit et désire.

 

Il existe une autre parole de Jésus, qui utilise l'image de la semence, et qui peut s'approcher de la parabole du semeur : "Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s'il meurt, il produit beaucoup de fruit" (Jn 12, 24). Ici, le Seigneur insiste sur le lien entre la mort de la semence et le fait de porter "beaucoup de fruit". Le grain de blé, c'est Lui, Jésus. Le fruit est la "vie en abondance" (Jn 10, 10), qu'Il nous a acquise à travers sa mort sur la Croix. Telle est également la logique et la véritable fécondité de toute pastorale des vocations dans l'Eglise : comme le Christ, le prêtre et l'animateur doivent être un "grain de blé" qui renonce à soi-même pour faire la volonté du Père ; qui sait vivre caché de la clameur et du bruit ; qui renonce à la recherche de la visibilité et de l'apparence qui aujourd'hui, deviennent souvent des critères et même des objectifs de vie dans tant de domaines de notre culture, et qui fascinent tant de jeunes.

 

Chers amis, soyez des semeurs de confiance et d'espérance. En effet, le sens d'égarement que vivent souvent les jeunes d'aujourd'hui est profond. Souvent, les paroles humaines sont privées d'avenir et de perspective, et également privées de sens et de sagesse. Une attitude d'impatience frénétique se diffuse, ainsi qu'une incapacité à vivre le temps de l'attente. Pourtant, celle-ci peut être l'heure de Dieu : son appel, par l'intermédiaire de la force et de l'efficacité de la Parole, engendre un chemin d'espérance à l'égard de la plénitude de la vie. La parole de Dieu peut devenir véritablement lumière et force, source d'espérance, elle peut tracer un chemin qui passe à travers Jésus "chemin" et "porte"; à travers sa Croix, qui est plénitude d'amour. Tel est le message qui nous vient de l'Année paulinienne, qui vient de se conclure. Saint Paul, conquis par le Christ, a suscité et formé les vocations, comme on le voit bien dans les saluts de ses lettres, où apparaissent des dizaines de noms propres, c'est-à-dire des visages d'hommes et de femmes qui ont collaboré avec lui au service de l'Evangile. Tel est également le message de l'Année sacerdotale qui vient de commencer : le Saint curé d'Ars, Jean-Marie Vianney - qui constitue le "phare" de ce nouvel itinéraire spirituel - a été un prêtre qui a consacré sa vie à la direction spirituelle des personnes, avec humilité et simplicité, "goûtant et voyant" la bonté de Dieu dans les situations ordinaires. Il s'est ainsi révélé comme un véritable maître dans le ministère du réconfort et de l'accompagnement des vocations. L'Année sacerdotale offre donc une belle opportunité de retrouver le sens profond de la pastorale des vocations, ainsi que ses choix fondamentaux de méthode : le témoignage, simple et crédible ; la communion avec des itinéraires concertés et partagés dans l'Eglise particulière ; la quotidienneté, qui éduque à suivre le Seigneur dans la vie de tous les jours ; l'écoute, guidée par l'Esprit Saint pour orienter les jeunes dans la recherche de Dieu et du véritable bonheur; et enfin, la vérité, qui seule peut engendrer la liberté intérieure.

 

Chers frères et sœurs, puisse la Parole de Dieu devenir en chacun de vous une source de bénédictions, de réconfort et de confiance renouvelée, afin que vous soyez en mesure d'aider de nombreuses personnes à "voir" et "toucher" ce Jésus qu'ils ont accueilli comme Maître.

 

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12 novembre 2010 5 12 /11 /novembre /2010 09:40

Extrait de l’Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Jean Scot Érigène, le 10 juin 2009.

 

Chers frères et sœurs,

 

Je voudrais parler aujourd'hui d'un penseur important de l'Occident chrétien : Jean Scot Erigène, dont les origines restent toutefois obscures. Il venait certainement d'Irlande, où il était né au début du IXe siècle, mais nous ne savons pas quand il a quitté son île pour traverser la Manche et prendre ainsi pleinement part au monde culturel qui renaissait autour des carolingiens, et en particulier autour de Charles le Chauve, dans la France du IXe siècle. De même que l'on ignore la date exacte de sa naissance, l'on ignore également l'année de sa mort qui, selon les experts, devrait toutefois se situer aux alentours de l'an 870.

 

Jean Scot Erigène possédait une culture patristique, tant grecque que latine, remarquable : il connaissait en effet directement les écrits des Pères latins et grecs. Il connaissait bien, entre autres, les oeuvres d'Augustin, d'Ambroise, de Grégoire le grand, grands Pères de l'Occident chrétien, mais il connaissait tout aussi bien la pensée d'Origène, de Grégoire de Nysse, de Jean Chrysostome, et d'autres Pères chrétiens d'Orient non moins importants. C'était un homme exceptionnel, qui maîtrisait à cette époque également la langue grecque. Il révéla une attention toute particulière pour Saint Maxime le Confesseur et surtout pour Denys l'Aréopagite (…).

 

En vérité, le travail théologique de Jean Scot ne connut pas beaucoup de succès. Non seulement la fin de l'ère carolingienne relégua ses œuvres dans l'oubli ; mais une censure de la part des autorités ecclésiastiques jeta également une ombre sur sa figure. En réalité, Jean Scot représente un platonisme radical, qui semble parfois s'approcher d'une vision panthéiste, même si ses intentions personnelles et subjectives furent toujours orthodoxes. Certaines œuvres de Jean Scot Erigène sont parvenues jusqu'à nous, parmi lesquelles méritent en particulier d'être rappelés le traité "sur la division de la nature" et les "Expositions sur la hiérarchie céleste de saint Denys". Il y développe des réflexions théologiques et spirituelles stimulantes, qui pourraient suggérer d'intéressants approfondissements également aux théologiens contemporains. Je me réfère, par exemple, à ce qu'il écrit sur le devoir d'exercer un discernement approprié sur ce qui est présenté comme auctoritas vera, ou sur l'engagement à continuer de rechercher la vérité jusqu'à ce que l'on parvienne à en faire quelque expérience dans l'adoration silencieuse de Dieu.

 

Notre auteur dit : "Salus nostra ex fide inchoat : notre Salut commence avec la foi". Nous ne pouvons donc pas parler de Dieu en partant de nos inventions, mais de ce que Dieu dit de Lui-même dans les Saintes Ecritures. Mais, étant donné que Dieu ne dit que la vérité, Scot Erigène est convaincu que l'autorité et la raison ne peuvent jamais être en opposition l'une avec l'autre ; il est convaincu que la véritable religion et la véritable philosophie coïncident. Dans cette perspective, il écrit : "Tout type d'autorité qui n'est pas confirmée par une véritable raison devrait être considérée comme faible... Il n'est, en effet, de véritable autorité que celle qui coïncide avec la vérité découverte en vertu de la raison, même s'il devait s'agir d'une autorité recommandée et transmise par les saints Pères pour la postérité" (1, PL122, col 513BC). Par conséquent, il avertit : "Qu'aucune autorité ne t'intimide ni ne te distraie de ce que te fait comprendre la persuasion obtenue grâce à un comportement droit et rationnel. En effet, l'autorité authentique ne contredit jamais la juste raison, pas plus que cette dernière ne peut jamais contredire une véritable autorité. L'une et l'autre proviennent sans aucun doute de la même source, qui est la sagesse divine" (I, PL 122, col 511B). Nous voyons ici une courageuse affirmation des valeurs de la raison, fondée sur la certitude selon laquelle l'autorité véritable est raisonnable, car Dieu est la raison créatrice.

 

L'Ecriture elle-même n'échappe pas, selon Erigène, à la nécessité d'être étudiée en utilisant le même principe de discernement. En effet, l'Ecriture – soutient le théologien irlandais en reproposant une réflexion déjà présente chez Saint Jean Chrysostome – bien que provenant de Dieu, ne serait pas nécessaire si l'homme n'avait pas péché. Il faut donc en déduire que l'Ecriture fut donnée par Dieu dans une intention pédagogique et par miséricorde afin que l'homme puisse se rappeler de tout ce qui avait été gravé dans son cœur dès le moment de sa création "à l'image et ressemblance de Dieu" (cf. Gn 1, 26) et que le péché originel lui avait fait oublier. Erigène écrit dans les Expositiones : "Ce n'est pas l'homme qui a été créé pour l'Ecriture, dont il n'aurait pas eu besoin s'il n'avait pas péché, mais c'est plutôt l'Ecriture – tissée de doctrine et de symboles – qui a été donnée pour l'homme. En effet, grâce à elle, notre nature rationnelle peut être introduite dans les secrets de l'authentique et pure contemplation de Dieu" (II, PL 122, col 146C). La parole de l'Ecriture Sainte purifie notre raison quelque peu aveugle et nous aide à revenir au souvenir de ce que nous portons, en tant qu'image de Dieu, dans notre cœur, rendu hélas vulnérable par le péché.

 

De là découlent certaines conséquences herméneutiques, en ce qui concerne la façon d'interpréter l'Ecriture qui peuvent indiquer aujourd'hui encore la juste voie pour une lecture correcte de l'Ecriture Sainte. Il s'agit en effet de découvrir le sens caché dans le texte sacré et cela présuppose un exercice intérieur particulier, grâce auquel la raison s'ouvre au chemin certain vers la vérité. Cet exercice consiste à cultiver une disponibilité constante à la conversion. Pour parvenir, en effet, à la vision profonde du texte, il est nécessaire de progresser simultanément dans la conversion du cœur et dans l'analyse conceptuelle de la page biblique, qu'elle soit à caractère universel, historique ou doctrinal. C'est en effet uniquement grâce à la purification constante tant de l'œil du cœur que de l'œil de l'esprit, que l'on peut en acquérir une compréhension exacte.

 

Ce chemin d'un accès difficile, exigeant et enthousiasmant, fait de conquêtes constantes et de relativisations du savoir humain, conduit la créature intelligente jusqu'au seuil du Mystère divin, là où toutes les notions révèlent leur faiblesse et leur incapacité et imposent donc, avec la simple force libre et douce de la vérité, d'aller toujours au-delà de tout ce qui est continuellement acquis. La reconnaissance adorante et silencieuse du Mystère, qui débouche sur la communion unificatrice, se révèle donc comme l'unique voie d'une relation avec la vérité qui est à la fois la plus intime possible et la plus scrupuleusement respectueuse de l'autre. Jean Scot – utilisant également dans ce contexte un vocabulaire cher à la tradition chrétienne de langue grecque – a appelé cette expérience à laquelle nous tendons"theosis"ou divinisation, à travers des affirmations hardies au point qu'il fut possible de le soupçonner de panthéisme hétérodoxe. Quoi qu'il en soit, l'émotion demeure profonde face à des textes comme celui-ci, où, ayant recours à l'antique métaphore de la fusion du fer, il écrit : "Ainsi, de même que tout le fer devenu brûlant se liquéfie au point qu'il ne semble plus y avoir que le feu, et toutefois les substances de l'un et de l'autre demeurent distinctes, ainsi, il faut accepter qu'après la fin de ce monde, toute la nature, tant corporelle qu'incorporelle, manifeste uniquement Dieu et demeure toutefois intègre de façon telle que Dieu puisse être d'une certaine façon compris tout en reste incompréhensible et la créature elle-même soit transformée, avec une merveille ineffable, en Dieu" (V, PL 12, col 451B).

 

En réalité, la pensée théologique de Jean Scot est la démonstration la plus évidente de la tentative d'exprimer ce qui peut être dit du Dieu indicible, en se fondant uniquement sur le mystère du Verbe incarné en Jésus de Nazareth. Les nombreuses métaphores qu'il utilise pour indiquer cette réalité ineffable démontrent combien il est conscient de l'insuffisance absolue des termes avec lesquels nous parlons de ces choses. Il demeure toutefois l'enchantement et cette atmosphère d'authentique expérience mystique que l'on peut de temps à autre toucher du doigt dans ses textes. Il suffit de citer, pour le démontrer, une page du De divisione naturae qui touche en profondeur également notre âme de croyants du XXIe siècle : "Il ne faut rien désirer d'autre – écrit-il – que la joie de la vérité qui est le Christ, ni rien éviter que Son absence. Celle-ci, en effet, devrait être considérée comme l'unique cause de tristesse totale et éternelle. Ote-moi le Christ, et il ne me restera aucun bien, et rien ne m'affligera plus que son absence. Le plus grand tourment d'une créature rationnelle est la privation et l'absence de Lui" (V, PL 122, col 989a). Ce sont des paroles que nous pouvons faire nôtres, en les traduisant en prière à Celui qui constitue également le désir ardent de notre cœur.

 

 

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