5 juin 2008 4 05 /06 /juin /2008 13:04

Extrait de l’homélie prononcée par le Pape Benoît XVI le 7 novembre 2006, lors de la Messe célébrée avec les Evêques Suisses.

A notre époque, nous connaissons très bien le "non" prononcé par ceux qui ont été invités en premier. En effet, les chrétiens d'Occident, c'est-à-dire les nouveaux "premiers invités", se dérobent aujourd'hui en grand nombre, ils n'ont pas le temps d'aller vers le Seigneur. Nous connaissons bien les Eglises qui se vident toujours plus, les séminaires qui continuent de se vider, les maisons religieuses qui se vident toujours plus ; nous connaissons toutes les formes sous lesquelles se présente ce "non, j'ai d'autres choses importantes à faire". Et cela nous fait peur et nous bouleverse d'être témoins de ces invités qui s'excusent et se dérobent, et qui en réalité, devraient comprendre la grandeur de l'invitation et devraient se presser dans cette direction. Mais que devons-nous faire ?

Nous devons avant tout nous poser une question : pourquoi cela a-t-il précisément lieu ? Dans sa parabole, le Seigneur cite deux raisons : la possession et les relations humaines, qui absorbent tellement les personnes qu'elles considèrent qu'elles n'ont plus besoin de rien d'autre pour remplir totalement leur temps et donc leur existence intérieure. Saint Grégoire le Grand, dans sa présentation de ce texte, a tenté d'aller plus loin et s'est demandé : mais comment est-il possible qu'un homme dise "non" à ce qu'il y a de plus grand ; qu'il n'ait pas de temps pour ce qui est plus important, qui contient en soi sa propre existence ? [Saint Grégoire] répond : En réalité, les hommes n'ont jamais fait l'expérience de Dieu ; ils n'ont jamais "goûté" à Dieu, ils n'ont jamais ressenti combien il est délicieux d'être "touché" par Dieu. Il leur manque ce "contact" et, à travers cela, le "goût de Dieu". Ce n'est que si, pour ainsi dire, nous le goûtons que nous venons alors au banquet. Saint Grégoire cite le Psaume, dont est tirée l'Antienne de la communion d'aujourd'hui : goûtez et dégustez, et voyez ; goûtez, et alors, vous verrez et vous serez illuminés! Notre devoir est d'aider les personnes à pouvoir goûter, afin qu'elles puissent sentir à nouveau le goût de Dieu.

Dans une autre homélie, saint Grégoire le Grand a approfondi plus encore la même question, et s'est demandé : Comment se fait-il que l'homme ne veuille pas même "goûter" Dieu? Et il répond : lorsque l'homme est occupé entièrement par son monde, par les choses matérielles, par ce qu'il peut faire, par tout ce qu'il peut réaliser pour connaître le succès, par tout ce qu'il peut produire ou comprendre, alors, sa capacité de perception à l'égard de Dieu s'affaiblit, l'organe qui perçoit Dieu dépérit, devient incapable de percevoir et insensible. Il ne perçoit plus le Divin, car l'organe correspondant en lui s'est desséché, il ne n'est plus développé. Lorsqu'il utilise trop les autres organes, ceux empiriques, alors, il peut advenir que précisément le sens de Dieu s'affaiblisse ; que cet organe meure ; et que l'homme, comme le dit saint Grégoire, ne perçoive plus le regard de Dieu, le fait d'être regardé par Lui – cette chose précieuse qu'est son regard qui se pose sur moi!

Je pense que saint Grégoire le Grand a décrit exactement la situation de notre époque – en effet, il s'agissait d'une époque très semblable à la nôtre. Et la question se pose encore : que devons-nous faire? Je pense que la première chose est celle que le Seigneur nous dit aujourd'hui dans la première Lecture et que saint Paul nous proclame au nom de Dieu : "Ayez en vous les mêmes sentiments qui sont dans Jésus Christ!". Apprenez à penser comme a pensé le Christ, apprenez à penser avec Lui! Et cette façon de penser n'est pas seulement celle de l'esprit, mais également une pensée du coeur. Nous apprenons les sentiments de Jésus Christ lorsque nous apprenons à penser avec Lui et donc, lorsque nous apprenons à penser également à son échec et à sa façon de traverser l'échec, à l'accroissement de son amour dans l'échec. Si nous entrons dans ses sentiments, si nous commençons à nous exercer à penser comme Lui et avec Lui, alors se réveille en nous la joie à l'égard de Dieu, la certitude qu'Il est de toute façon le plus fort ; oui, nous pouvons le dire, l'amour pour Lui se réveille en nous. Nous ressentons combien il est beau qu'Il soit là et que nous puissions Le connaître – que nous le connaissions dans le visage de Jésus Christ, qui a souffert pour nous. Je pense que c'est la première chose : que nous entrions nous-mêmes dans un contact vivant avec Dieu, avec le Seigneur Jésus, le Dieu vivant ; que se renforce en nous l'organe qui perçoit Dieu ; que nous portions en nous la perception de son "goût exquis". Cela encourage également notre action, car nous aussi, nous courons un risque : on peut faire beaucoup, tant de choses, dans le domaine ecclésial, tout pour Dieu... et ce faisant, se tenir totalement à l'écart, sans jamais rencontrer Dieu. L'engagement se substitue à la foi, mais ensuite, se vide de l'intérieur. Je pense donc que nous devrions nous engager surtout dans l'écoute du Seigneur, dans la prière, dans la participation intime aux sacrements, dans l'apprentissage des sentiments de Dieu sur le visage et dans les souffrances des hommes, pour être ainsi contaminés par sa joie, par son zèle, par son amour, et pour regarder avec Lui, et à partir de Lui, le monde. Si nous réussissons à faire cela, alors même au milieu de tant de "non", nous trouverons à nouveau les hommes qui L'attendent et qui sont souvent peut-être insolites – la parabole le dit clairement – mais qui sont tout de même appelés à entrer dans sa salle.

Une fois de plus, en d'autres termes : il s'agit de la place centrale de Dieu, et précisément non pas d'un dieu quelconque, mais du Dieu qui a le visage de Jésus Christ. Cela est important aujourd'hui. Il y a tant de problèmes que l'on pourrait énumérer mais qui – tous – ne peuvent être résolus si Dieu n'est pas placé au centre, si Dieu ne devient pas à nouveau visible dans le monde, s'il ne devient pas déterminant dans notre vie et s'il n'entre pas également à travers nous de façon déterminante dans le monde.



Lire le texte intégral de l'homélie du Pape Benoît XVI  

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Publié par Matthieu BOUCART -
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