13 janvier 2008 7 13 /01 /janvier /2008 16:40

Cher Miky,

Je voudrais commencer à répondre – enfin ! – à ta série de trois (longs) articles publiés cet été sur ton Blog, sous le titre "Inférence à la meilleure explication... ou à l'explication favorite?"


Je dis « commencer », parce que ma réponse risque d’être un peu longue, et que le format du Blog se prête davantage à des articles de dimension modérée qu’à de longs développements de type universitaire. Il me faudra donc étaler ma réponse dans le temps. Je ne puis te dire encore combien de posts me seront nécessaires pour te répondre entièrement : j’en vois au moins quatre... Mais qu’importe, après tout ! Nous avons l’éternité devant nous...

Je répondrais à ton article en sa première version, tel que tu l’as publié sur Metazet en trois parties les 15 et 16 juillet 2007, et non en sa version longue (pour des raisons techniques, je n’ai pu en prendre connaissance, malgré ma commande : ce n’est pas grave, mais cela me laisse quand même un peu sur ma faim…). Cela dit, la version courte est déjà bien assez « musclée » comme cela ; il faut prendre le temps de la lire – stylo et stabilo en main ! –, d’y réfléchir, puis de la digérer… C’est ce que j’ai fait, et tu vois : cela m’a pris six mois ! Je serais bien curieux de savoir si tes lecteurs (ou les miens) sont nombreux à avoir lu ce texte, et à l’avoir compris. Avoue qu’il n'est pas facile d’accès pour le vulgus peccum !

Pour ma part, malgré l’aridité de la démonstration, j’y ai trouvé des éléments intéressants qui vont, disais-je alors en commentaire de ton deuxième article, « nous permettre d'avancer dans le débat » (Commentaire n°1). Je pense en effet qu’au terme de ma réponse, nous serons mieux fixé l’un et l’autre sur nos positions respectives, ainsi que sur la manière de poser les problèmes et d’y répondre.

Je rappelle à mes lecteurs le contexte de cette disputatio. A la base de notre discussion, il y a cette pensée, qui est comme le fil conducteur de toute ma réflexion sur ce Blog, et que j’exprimais ainsi dans mon dernier article sur l'Epiphanie de Dieu dans la Création :
« Tout homme peut avoir connaissance de l’existence de Dieu à partir de ses seules facultés naturelles, sans l’aide de la Révélation ni grâce particulière du Saint Esprit, à partir de l’observation de l’œuvre de la Création et d’une réflexion sur l’Univers physique et la Nature qui nous environne. » L’existence de l’univers et ses caractéristiques intrinsèques suffisent, selon moi, à démontrer de façon convaincante et de manière certaine l’existence de Dieu. « Nul besoin de la foi pour croire en l’existence de Dieu : l’activité de la seule intelligence suffit », ajoutais-je encore.

Or, cette idée est précisément celle que tu contestes de toutes tes forces, et dont tu t’emploies avec énergie - et talent! - à démontrer l’inanité sur ton Blog et dans les commentaires que tu laisses ici-même à mes articles. Pour toi, il n’existe pas de preuves de l’existence de Dieu, en tous les cas aucune qui soit suffisamment contraignante pour mériter l’appellation de « preuve » et permettre à l’homme de fonder une vraie certitude, une certitude rationnelle, au sujet de l’existence de Dieu. La seule manière pour l’homme de savoir si Dieu existe serait donc, selon toi, que Dieu se manifeste directement à lui (et encore ! cela ne serait une preuve que pour la personne « visitée », la grande subjectivité de l’expérience ne permettant pas d’en généraliser l’enseignement à tous). Mais en dehors de ce cas de figure, la raison, penses-tu, est impuissante par elle-même à communiquer la moindre certitude quant à l’existence de Dieu. Si le contraire était vrai, écris-tu, cela se saurait, et le monde entier croirait. Si le monde ne croit pas, c’est que ces prétendues preuves n’en sont pas, et qu’elles ne peuvent satisfaire dans le meilleur des cas que ceux qui ont déjà pour elles un préjugé favorable. (Ai-je bien résumé ta pensée ?)

Il est intéressant de noter – pour bien sérier le débat – que notre opposition ne porte pas d’abord, malgré les apparences, sur la question de l’existence de Dieu. Tu n’affirmes pas en effet que Dieu n’existe pas. Tu n’exclues pas absolument qu’il puisse exister (encore que s’il existe, tu réfutes absolument et en tout état de cause le Dieu chrétien : de ce Dieu là, en effet, tu te revendiques résolument athée…) ; tu dis simplement qu’on ne peut pas savoir si Dieu existe ou pas. Quand j’affirme que la raison humaine est capable par elle-même et à elle seule de connaître avec certitude l’existence de Dieu, tu répliques en écho… que la raison humaine est incapable par elle-même et à elle seule de connaître avec certitude l’existence de Dieu. Notre opposition sur ce point est donc frontale. Mais notre divergence n’est pas d’ordre religieux. Elle est d’ordre métaphysique. Car ce n’est pas la religion que tu contestes en réalité (chacun est libre de croire ce qu’il veut, diras-tu), mais la prétention qu’a la métaphysique d’apporter de vraies réponses – sur lesquelles fonder de vraies certitudes – aux grandes questions qui se posent à la raison humaine. Je vais donc me faire ici l’avocat non de la Religion, mais de la Métaphysique que tu rejettes en même temps que tu t’en revendiques (tu as ainsi classifié ton Blog dans la Catégorie « Métaphysique », ce qui est pour moi un non-sens...). J’espère pouvoir trouver dans cette discussion quelques alliés au-delà des frontières de la religion. J’invite en particulier tous ceux qui croient en la capacité de la Raison humaine à connaître la Vérité de manière certaine à ne pas hésiter à intervenir, à un moment ou à un autre, dans ce débat.

Ce qui est en jeu dans notre dispute, disais-je, ce n’est pas d’abord la question de l’existence de Dieu ; c’est celle de savoir si l’intelligence humaine est capable ou non de trancher cette question, de résoudre ce problème de manière définitive et certaine. Cette question est première, avant toute réflexion sur l’existence de Dieu. Car si la réponse est négative (on ne peut pas savoir avec certitude), alors la discussion s’arrêtera là : on ne pourra aller plus loin. On pourra croire si l’on veut, mais il faudra pour cela poser un acte de foi aveugle, avec une chance sur deux (au moins) de se tromper. C’est la position de Miky. Si la réponse en revanche est positive (on peut savoir avec certitude), il sera alors possible de trancher en considérant les arguments des deux « camps » opposés : on pourra résoudre la difficulté au moyen d'un raisonnement intelligent, avec 99 chances sur 100 de ne pas se tromper (mettons un risque d’erreur à 1 % pour ne pas froisser les susceptibilités…). C’est ma position à moi.

Dans un article consacré à la question de savoir si l'on pouvait se fier au raisonnement métaphysique pour trancher de manière définitive et certaine la question de l'existence de Dieu, tu m’as répondu par tes trois articles au format Blog, soit un grand article divisé en trois parties, celui-là même auquel je souhaiterais répondre maintenant.

Cet article a pour toi, manifestement, une grande portée. Il n’y a qu’à lire le commentaire scandalisé que tu faisais à mon dernier texte sur l'Epiphanie (commentaire n°2) :
« Avec tout le mal que je me suis donné dans mon dernier article de plusieurs dizaines de pages sur l'abduction (sans parler des heures passées à réfléchir, rechercher, écrire, depuis deux ans), je suis un peu déconcerté que tu trouves encore le moyen d'affirmer avec tout l'aplomb du monde qu'il suffit de réfléchir sur l'univers pour croire en l'existence de Dieu... Tu en es encore là ? Je désespère :-( Que te faut-il donc comme preuves supplémentaires pour ne serait-ce que mettre un peu d'eau dans ton vin, un peu de nuances dans tes certitudes ? »

Il paraît évident, à te lire, que tu considères ton article comme apportant une contribution décisive à notre débat, comme un point final à notre discussion. Je n’aurais plus qu’à en tirer sagement les conclusions, à « mettre de l’eau dans mon vin », et à cesser d’affirmer
« avec tout l'aplomb du monde qu'il suffit de réfléchir sur l'univers pour croire en l'existence de Dieu ».

Cet article semble aussi avoir marqué le Pasteur Eric George, qui m'écrivait récemment (commentaires n°4 et suivants) :
« il me semble que Micky vous a proposé une foule de contre-arguments qui sur un plan rationnel tiennent la route mieux que les votres... »

Bigre, me voilà cerné… L’étau se resserre… Si la « foule » des contre-arguments de Miky reçoit de surcroît une caution chrétienne, me voilà « fait »… ou défait, selon le cas... Je n’ai plus qu’à fermer boutique, à prendre ma canne à pêche… en espérant que là, peut-être, au milieu des petits poissons, je perdrai un peu moins mon temps qu'ici, devant mon ordinateur...

Plus sérieusement, nous allons regarder d’un peu plus près de quoi il retourne. Qu’y a-t-il donc, Miky, dans ton article de si décisif, de si incontournable, de si imparable ? Qu’est-ce qui légitime dans ce texte ton intuition d’avoir dorénavant « quelques longueurs d’avance » sur les partisans de la théologie naturelle ? Quels sont ces fameux contre-arguments (cette "foule" de contre-arguments...) qui, sur le plan rationnel et selon le Pasteur Eric George, tiennent mieux la route que les miens - mais dont personne au passage n’est capable, bien étrangement, d’énoncer le contenu quand j’en fais la demande...

Je sais bien que les articles de Miky peuvent avoir un petit côté impressionnant, en raison de la très grande complexité du raisonnement et de la haute technicité des concepts employés (abduction, IME, critères de type A... ; des équations dans tous les sens...). On se dit sans doute inconsciemment que si c’est si compliqué, c’est que ça doit être vrai... Mais il va nous falloir aller au-delà des premières impressions et nous affranchir de toute appréhension pour aller au fond du débat. Et vous allez voir que nous allons avoir des surprises…

(à suivre…)

 

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Publié par Matthieu BOUCART -
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commentaires

M
Cher Miky,Un grand merci à toi pour ton dernier envoi! Je vais pouvoir bûcher plus à fond...
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