Par l’ensemble des Ecritures s’accomplit la venue du Verbe dans le monde. Les lettres, les vocables prononcés, sont comme le « corps », les moyens, les signes efficaces et pour ainsi dire le sacrement de cette venue nouvelle, incessante du Verbe dans les âmes. C’est cette même Parole-Logos qui s’est incorporée dans l’Ecriture, qui s’est incarné en Jésus-Christ. Comme le résume le Cardinal de Lubac, il s’agit du même « Logos-Parole qui jaillit du Père, qui se répand dans l’Ecriture et qui se fait chair en Jésus. »
Certes, il ne s’agit que d’une comparaison entre la lettre de l’Ecriture dans laquelle s’incarne le Verbe, et la chair de la Vierge dont il reçoit le corps ; « néanmoins, il y est vraiment incorporé, il y habite lui-même et non pas seulement quelque idée sur lui ; et c’est ce qui autorise à parler déjà de sa venue, de sa présence cachée. Venue et présence auprès des Saints de l’Ancien Testament ; venue et présence qui se perpétuent au milieu de nous par la conservation de l’Ecriture au sein de l’Eglise ; venue et présence qui s’actualisent à nouveau chaque fois que cette Ecriture nous illumine. » (H. de Lubac, « Histoire et Esprit ; l’intelligence de l’Ecriture d’après Origène », Aubier, coll. Théologie, n° 16, Paris, 1950, p. 336.)
Ainsi donc, incorporée dans l’Ecriture ou incarnée dans le Christ, c’est toujours la même Parole éternelle du Père, le même Logos qu’il faut atteindre au-delà du voile de la lettre et de la chair :
« Aux derniers jours, la Parole est venue en ce monde issue de Marie et revêtue de chair, et autre était ce que les yeux voyaient de sa personne, autre ce que l’Esprit pouvait comprendre. Tous pouvaient apercevoir sa figure charnelle, mais bien peu, les élus seulement, recevaient la grâce de reconnaître en lui la divinité. De même que dans le Nouveau Testament, la Parole était couverte du voile de la chair, l’Ancien Testament la couvre du voile de la lettre. Ici on voit la lettre, comme là on voit la chair, mais dans les deux cas, on reconnaît que la réalité profonde, cachée sous ces apparences, c’est la divinité. Bienheureux les yeux qui voient l’Esprit divin caché sous le voile de la lettre ! »
Origène, Homélie sur le Lévitique, I, 1.
Source : Joseph-Marie VERLINDE, "Initiation à la Lectio Divina", Parole & Silence, 2002, Chapitre "Dieu présent dans les Ecritures", p. 19 et s.