[Cet article est la suite de La morale... sans Jésus? ]
Cher Miky,
J’en viens à ton article sur l'absolu et le relatif.
Le passage auquel je souhaiterais réagir est le suivant :
« L'Eglise Catholique Romaine enseigne que la masturbation est un pêché mortel. Cet enseignement n'est pas un principe axiomatique relevant d'un absolu, mais est justifié de la sorte :
1. Toute activité biologique a été créée par Dieu dans une certaine finalité qui correspond à sa fonction biologique (par exemple, l'activité sexuelle a été créée par Dieu dans la finalité de la reproduction, l'activité locomotrice dans la finalité de trouver de la nourriture, de fuire les ennemis et de rechercher un partenaire sexuel, l'activité digestive dans la finalité de l'alimentation, etc.)
2. Il est éthiquement mauvais (péché mortel) de faire usage d'une activité biologique en dehors de sa finalité biologique.
3. La masturbation est l'usage de l'activité sexuelle en dehors de sa finalité biologique reproductive.
4. La masturbation est un péché mortel.
Il ne sert évidemment à rien, face à un catholique intégriste, de contester le point 1 scientifiquement en arguant que la science ne démontre pas que les activités biologiques ont été créées par Dieu ou de contester le point 2 en disant que l'on ne voit pas, scientifiquement, ce qu'il y a de répréhensible de le fait de faire usage d'une activité biologique en dehors de sa finalité biologique, car de toute manière, scientifiquement seulement, il est impossible de fonder une éthique.
Toutefois, le principe d'identité étant commun à la science, à l'éthique et à la religion catholique, on peut argumenter de la façon suivante :
Montrer qu'en suivant ce raisonnement :
- machouiller du chewing-gum est un péché mortel (usage de la fonction masticatoire en dehors de sa finalité alimentaire)
- aller au cinéma ou même à l'église est un péché mortel (usage de la fonction locomotrice en dehors de sa finalité de recherche de nourriture, de fuite des ennemis et de recherche d'un partenaire sexuel)
- se tailler la barbe est un péché mortel (usage des poils dans un but purement esthétique, et non pas de protection contre le froid)
Ensuite, demander à la personne prétendant que la masturbation est un péché mortel si elle ne s'est pas déjà livrée plusieurs fois à ces autres "péchés mortels". »
Tu prolonges ta réflexion dans ton commentaire à mon article sur La Bible... ou les astres? en écrivant :
« Moralement, l'Eglise a aussi des conséquences néfastes (sic) : c'est "l'opium du peuple" qui détourne de l'action ici-bas en faisant espérer une vie meilleure au-delà. Bien sûr, il y a des grands hommes d'actions chrétien, mais on ne peut nier qu'il y a aussi beaucoup de gens contemplatifs qui se "choutent" littéralement "au saint esprit", pour reprendre l'expression d'un prêtre invité une fois à l'émission "Ca se discute".
« La morale sexuelle de l'église est aussi assez catastrophique : la masturbation est un pêché mortel, le préservatif est à proscrire (bonjour le sida !), l'homosexualité est un pêché mortel, avoir des relations sexuelles pour le plaisir partagé et même pour exprimer une amitié, un attachement, un amour, et même avec un grand A, est un pêché mortel du moment que cela ne se passe pas entre personnes mariés de sexe différent et dans l'optique de la procréation, etc.
« Je sais que pêché veut simplement dire "manquer la cible", mais "mortel" veut quand même dire que cela détourne radicalement de Dieu et cause la privation de la grâce sanctifiante, ce qui, quand on est un fervent catholique, est une perspective assez effroyable je trouve.
« Tout cela, si on le prend au sérieux, est susceptible d'entraîner dépressions et névroses chez nombre de ceux (homosexuels en particulier) qui veulent s'y astreindre. Quant à la justification de la nature immorale de ses pratiques ? Les raisonnements de l'Eglise à ce sujet sont bien peu convainquants »
...et de renvoyer mes lecteurs au passage de ton article cité plus haut.
Tu soulèves donc dans tes textes de nombreuses questions auxquelles je ne puis pas ne pas répondre, tant tes arguments me paraissent manquer de nuance et, disons-le, de discernement.
Un petit conseil fraternel au passage, Miky : pour critiquer un système de pensée quelconque, il est indispensable de l’étudier préalablement à fond, sans préjugé ni œillères, à peine de tomber... dans l'erreur, et de dire (pardonne-moi l'expression...) des « sottises ».
Or dans le cas de l'espèce, il m’est difficile de ne pas pointer du doigt quelques appréciations franchement erronées :
Tu dis que pour l’Eglise : « la masturbation est un péché mortel » ? Je suis désolé, mais on ne peut pas dire cela comme cela !
« Le préservatif est à proscrire » ? Je suis désolé, mais on ne peut pas dire cela comme cela !
« L’homosexualité est un péché mortel » ? Je suis désolé, mais on ne peut pas dire cela comme cela !
« Avoir des relations sexuelles hors mariage est un pêché mortel » ? Je suis désolé, mais on ne peut pas dire cela comme cela !
Pour te répondre, je souhaiterais articuler ma réflexion autour de 5 points consécutifs (sans exclure d'autres développements en fonction de tes remarques ou celles d'autres lecteurs), que je te propose de développer ainsi :
1°) Qu’est-ce que le péché ?
2°) Qu’est-ce qu’un péché mortel ?
3°) Pourquoi la luxure est-elle un péché grave ?
4°) Pourquoi la masturbation est-elle un péché grave ?
5°) L’Eglise est-elle l’adversaire du plaisir sexuel ?
(à suivre...)