20 janvier 2008 7 20 /01 /janvier /2008 18:05

Cher Miky,

Dans mon précédent article, je t’annonçais le début de ma réponse à tes trois articles sur l’
"Inférence à la meilleure explication... ou à l'explication favorite?", dans lesquels tu t’efforçais de réfuter l’idée – défendue sur ce Blog – qu’il soit possible d’inférer certainement de l’observation de l’univers physique l’existence de Dieu.

J’annonçais en particulier des « surprises » à l’examen critique de ton article... Je rappelle à mes lecteurs que cet article, publié l’été dernier sur ton Blog, passe dans ton esprit – comme dans celui de certains de mes lecteurs – comme la réponse décisive aux arguments de la théologie naturelle ; comme un texte apportant une « foule de contre-arguments » qui, sur un plan rationnel, tiendraient mieux la route que les miens ; comme l’ultima ratio de l'agnosticisme épistémologique dont tu te fais le héraut et que tu présentes volontiers comme la « philosophie qui ressort vainqueur » de l’histoire de la pensée.

Alors, qu’en est-il donc de ce fameux article ? Quid de ces arguments massues censés mettre un point final au débat entre nous, et devant lesquels je n’aurais plus qu’à m’incliner, « ne serait-ce que [pour] mettre un peu d'eau dans [mon] vin, un peu de nuances dans [mes] certitudes » ? Comment t’y es-tu donc pris pour démontrer qu’il n’est pas possible d’inférer avec certitude l’existence de Dieu de la simple observation de l’univers ?

Eh bien… et c’est la première surprise… pour contredire la réponse que j’apporte au problème posé par l’existence de l’univers (à savoir : Dieu), tu vas objecter que… le problème en réalité n’en est pas un et que la question ne se pose pas ! Autrement dit, tu n’opposes pas directement à mes propos de « contre-arguments » à proprement parler (ces fameux « contre-arguments » invoqués par certains lecteurs, et que l’on s’attendait à trouver dans ton article) ; tu te contentes simplement d’affirmer – au moins implicitement – que mes propos n’ont pas lieu d’être, puisque la question à laquelle je m’efforce de répondre ne se pose pas ; que le problème auquel je cherche à trouver une solution n’existe pas !

La véritable question qui se pose à l’homme selon toi, la seule véritable question, que tu appelles q, « est une proposition correspondant à un état du monde constatable mais (au moins provisoirement) inexpliqué (selon les standards scientifiques). Il peut s’agir de quelque chose de véritablement étonnant, ou simplement d’inhabituel, qui dévie un tant soit peu du cours naturel et normal des choses (…). En revanche, ajoutes-tu, ce qui est régulier, prévisible, normal, habituel, naturel, commun, ordinaire, etc. n’est pas le genre de chose où l’IME intervient en général, car ce qui est ainsi n’a généralement pas besoin d’être expliqué. »

L’IME, que tu présentes comme
« le principal cheval de bataille des tenants de la théologie naturelle », ne peut donc s’appliquer, selon toi, à l’univers, puisque l’univers ne pose pas de problème en soi. L’IME, en toute rigueur, ne peut s’employer qu’à résoudre de vrais problèmes se posant à l’esprit humain, tels qu’« un témoignage d’apparition de la Vierge Marie ou une observation d’OVNI », ou même « un simple mal de gorge dont on cherche la cause (il peut y en avoir plusieurs possibles : grippe, coryza, égosillement, etc.) ou un vol par effraction dont on cherche l’auteur (il peut y avoir plusieurs suspects et mobiles potentiels) ». Pourvu que ce soit quelque chose qui sorte de l’ordinaire, et dont on n’a pas d’explication au regard de « ce qui est régulier, prévisible, normal, habituel, naturel, commun, ordinaire » dans notre expérience des choses.

« Je me donne un coup de marteau sur les doigts, j’éprouve de la douleur. Le lien entre les deux est évident. Je sais, par induction, que se donner un coup sur les doigts fait mal. Je m’attends donc à ce que ce coup me fasse mal. Si en revanche, après m’être donné un coup de marteau sur les doigts je n’avais ressenti aucune douleur, c’est là que cela aurait été étonnant, que je me serais posé la question « pourquoi ? », et que j’aurais passé en revue diverses hypothèses à la recherche de celle qui me fournirait la « meilleure explication. »

La première équation que tu poses, Miky, est donc celle-ci : pour chercher une « meilleure explication » à un problème donné, encore faut-il que le problème se pose ! « q doit être un fait qui sort de la normale, et requiert par conséquent une explication ». C’est là ton postulat de départ. A tout problème, il existe une « meilleure explication », selon la méthode que tu définies. Mais encore faut-il qu’il y ait un problème à résoudre, car s’il n’y a pas de problème, il n’y a évidemment pas de solution à rechercher !

Or, la question de l’existence de l’univers, nous dis-tu, est un faux problème ; une question qui ne se pose pas, et qui par conséquent n’appelle aucune solution. « Dans le cas des miracles et des expériences religieuses au moins, on peut assez facilement [légitimer le recours à l’IME]. Car en effet, ces phénomènes se définissent par contraste (flagrant !) avec le cours naturel des événements. Ces derniers vont donc fournir le cadre de la normalité à partir duquel miracles et expériences religieuses pourront être définis dans leur anormalité. Mais en est-il de même concernant l’univers dans sa totalité et dans toutes ses parties ? De quels critères disposons-nous pour affirmer que normalement, l’univers devrait être tel ou tel et non pas comme il est ? Notre univers est le seul que nous connaissons. Qu’il ait bien les propriétés qu’il a n’est donc pas forcément étonnant, objectivement parlant. »

En d’autres termes, tu ne reproches pas aux
« tenants de la théologie naturelle » l’emploi de l’IME. La méthode en tant que telle est même plutôt bonne, à te lire. Non, tu leur reproches simplement d’appliquer l’IME à un problème qui ne se pose pas : à savoir, l’existence de l’univers. Et pourquoi le problème ne se pose pas ? Parce que notre univers est la seule réalité que nous connaissions… Si l’univers est, et s’il est ce qu’il est comme il est, eh bien c’est comme ça ! Ce n’est pas un problème en soi, ce n’est pas étonnant objectivement parlant. Il n’est pas étonnant en effet que l’être soit, puisque l’être ne peut pas ne pas être. L’être est, un point, c’est tout ! Et s’il est ce qu’il est comme il est, eh bien c’est comme ça ! Il faut simplement en prendre acte. Il est vain et illusoire en tous les cas de vouloir chercher à tout prix une explication à ce qui n’en a pas…

« Les phénomènes à expliquer doivent être improbables
a priori, martelles-tu, c’est-à-dire en fonction des connaissances disponibles (ex. : une pluie de grenouilles). Car on voit mal l’intérêt d’expliquer ce que toutes les théories prévoient. » Or, que nous enseignent les « connaissances disponibles », sinon que l’univers existe tel qu’il existe ? Et que prévoient les « théories », si ce ne sont les règles de fonctionnement d’un univers qui se développe très bien tout seul, merci, sans l’aide de personne !

Puisque l’existence de l’univers ne pose pas de problème en soi, il n’y a évidemment pas à rechercher l’existence de Dieu, ni d’une quelconque autre Cause à cet univers qui ne peut pas avoir d’autre Cause que lui-même (puisque l’être ne peut pas ne pas être). Et puisque notre univers est, et que l’être ne peut pas ne pas être, Dieu n’est absolument pas nécessaire ; seul l’univers connaissable, lui, est nécessaire (puisqu’il existe, et qu’il ne peut pas ne pas être). C’est donc lui et lui seul qui nous fournit le cadre de référence nécessaire à toute notre réflexion sur les questions posées par les phénomènes anormaux constatés dans ce monde physique. Toutes les explications à toutes nos questions (nos vraies questions : les maux de gorge, les vols par effraction, les OVNI… toutes ces grandes questions métaphysiques…) seront nécessairement à rechercher en lui (l’univers physique) – et non ailleurs. Parce que seule compte la réalité réelle, et non la solution hypothétique à un problème hypothétique. Toutes les énigmes non encore élucidées sur cette terre trouveront nécessairement leur explication ultime dans la Nature. Parce qu'elle est la seule réalité nécessaire et connaissable.

Le problème, vois-tu cher Miky, c’est que nous sommes là typiquement en présence d’un présupposé – dont je conteste pour ma part le bien-fondé –, et d’un présupposé particulièrement nocif parce qu’il fausse irrésistiblement toute la suite de ton raisonnement ! Pourquoi ? Parce que si tu évinces d’emblée le problème de l’existence de l’univers, alors tu évinces en même temps la solution à ce problème qui est l’existence de Dieu. Et si tu évinces d’emblée l’existence de Dieu, alors il ne te restera plus en effet que Mère Nature et notre monde physique comme principes explicatifs rationnels aux phénomènes encore inexpliqués de notre monde.

C’est ce que tu écris du reste dans ton second article :
« Puisque [Dieu, écris-tu] transcende par définition le monde sensible, les données et théories générales dont nous disposons pour décrire ce monde sensible ne peuvent servir à lui affecter une probabilité a priori d’existence. Il est pourtant essentiel de connaître cette probabilité a priori de l’existence de Dieu, afin de la comparer avec la probabilité a priori des phénomènes anormaux qui se manifestent de temps en temps dans notre monde sensible, pour pouvoir inférer l’existence de Dieu comme meilleure explication de ces phénomènes anormaux (…). Dieu étant par définition transcendant, nous ne disposons pas de points de repères sur lesquels s’appuyer pour calculer valablement sa probabilité a priori d’existence. Il en découle que l’on ne peut calculer sa probabilité d’existence a posteriori, par une inférence à la meilleure explication basée sur l’observation des phénomènes anormaux que sont les miracles ou les expériences religieuses par exemple. » On ne saurait être plus clair : puisque nous n’avons, dis-tu, aucun moyen de connaître a priori l’existence de Dieu (et pour cause ! tu as décidé a priori que la question ne se posait pas), la conséquence logique est qu’il n’est pas possible a posteriori d’en inférer l’existence pour expliquer les phénomènes anormaux observés dans ce monde.

Oh, certes, diras-tu : on pourra toujours supposer l’existence de Dieu (ou d’un dieu) pour résoudre telle ou telle difficulté, ou pour boucher les trous d’une connaissance scientifique encore lacunaire, loin d’avoir percé tous les mystères de la nature ; mais en privant par avance l’existence de Dieu de son assise rationnelle la plus solide, à savoir l’existence de l’univers, tu réduis Dieu à l’état de simple hypothèse en laquelle il n’est plus possible de croire qu’en vertu d’un acte de pure foi aveugle, ou d’un pari un peu insensé. Il n’est dès lors pas étonnant qu’en face d’un univers bien réel et existant, l’hypothèse « Dieu » ne te paraisse guère peser plus de poids que celle de l’existence d’une « licorne rose » ou d’un « monstre de spaghettis volants ». Mais comprends bien Miky qu'il s'agit là du résultat non d’une rigoureuse démonstration rationnelle de ta part, mais d’un préjugé qui imprègne toute ta pensée et qui, sournoisement, en influence le cours dans un certain sens.

Il est amusant Miky de noter qu’au fond, tu pratiques exactement – mais à l’envers – la méthode des théologiens naturels. Tu reproches à ceux-ci d'avoir pour présupposé l'existence de Dieu. Tu considères en effet que si l’on place Dieu au début du raisonnement, on le trouvera naturellement à la fin. Mais ce n’est pas alors, dis-tu, la démonstration qui conduira à la conclusion de l’existence de Dieu : c’est le présupposé. Eh bien symétriquement : si tu poses comme postulat de départ que l’univers ne pose pas de problème (et que Dieu n’est pas sa solution), alors fatalement : à l’arrivée de tous tes raisonnements, tu ne trouveras pas Dieu (sauf acte de pure foi aveugle, dénuée de toute raison : un saut dans le vide…) Mais ce n’est pas ta démonstration qui aboutira à ce résultat : c’est ton présupposé. Ou comme tu le dis si bien :
« je vois l’IME, lorsqu’il s’agit d’évaluer des hypothèses métaphysiques, bien plus comme un moyen de renforcer une croyance préalable, que comme un moyen de trouver la vérité. Il y a bien une certaine rationalité dans ce cheminement, mais elle est secondaire, elle vient après la croyance, pour la confirmer, et non en amont pour la fonder. » Ce que tu omets de préciser dans ton article, cher Miky, c’est que ce raisonnement, que tu appliques volontiers aux affreux « tenants de la théologie naturelle », s’applique très bien à toi aussi, ainsi que je viens de le démontrer…

Notre univers est-il suffisant ? Peut-il rendre compte à lui tout seul de sa propre existence ? Est-il aussi nécessaire et évident que tu le penses et professes, cher Miky, ou bien au contraire pose-t-il aujourd’hui de graves questions à notre raison humaine ? Bref, le préjugé qui sous-tend toute ta démonstration est-elle exempte de critique ? Ton présupposé – qui est le point de départ de toute ta réflexion – est-il légitime et justifié ? C’est ce qu’il convient maintenant d’établir.

Nous verrons dans un prochain article pourquoi la question de l’existence de l’univers se pose à nous d’une manière absolument incontournable, et dans des articles ultérieurs pourquoi l’existence de Dieu est sa meilleure solution – sa solution la plus rationnelle. Nous tâcherons de démontrer qu’il est possible d’établir certainement l’existence de Dieu à partir d’une réflexion philosophique sur l’univers. Nous nous livrerons pour cela à un exercice, non de théologie naturelle, mais de métaphysique première : cette métaphysique qui n’a d’autre présupposé que l’existence de l’univers et la réalité du monde observable, et qui cherche à explorer le réel pour en tirer toute les implications philosophiques, au-delà (par définition) de ce qui est empiriquement attestable, selon la méthode chère à Aristote et – plus près de nous – Henri Bergson.

(à suivre…)

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Publié par Matthieu BOUCART -
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T
- Montrer que l'existence de Dieu, avec les caractéristiques que tu lui prêtes, pose moins de problème que l'existence de notre univers avec les caractéristiques qui sont les siennes.- Montrer que l'existence, dans l'esprit de Dieu, de l'idée et du projet de créer l'univers tel que nous le connaissons, est moins problématique que l'existence de l'univers tel que nous le connaissons.     Je ne vois pas bien en quoi ce sont là des pistes de réflexion, puisqu'elles semblent opposer "l'univers tel que nous le connaissons" et "l'existence de dieu" ; or, je ne vois pas bien le lien avec tout ce qui précède, puisque la question est de l'origine (non pas temporelle, mais origine comme source d'existence et principe d'existence) de cet univers.Qu'il est comme nous le connaissons, c'est un constat et c'est le point de départ, justement (et comme l'a redit plus haut Matthieu).   Si on veut honnêtement retranscrire le débat, en lui donnant une piste de départ sur le modèle de ce que tu donnes là, cela donnerait plutôt :- "Montrer que l'existence de Dieu, avec les caractéristiques que tu lui prêtes, pose moins de problème que l'existence de notre univers spontanée et grâce au seul hasard"- "Montrer que l'existence, dans l'esprit de Dieu, de l'idée et du projet de créer l'univers tel que nous le connaissons, est moins problématique que l'existence de l'univers tel que nous le connaissons due au seul et unique hasard"  Et voilà l'enjeu du débat.Faire comme s'il s'agissait de choisir entre "l'univers tel que nous le connaissons" et "un univers où dieu existe", ça n'est pas présenter honnêtement la question, puisque d'une part c'est poser déjà le postulat que "l'univers tel que nous le connaissons" exclue dieu, et c'est croire que ceux qui croient en dieu ne voient pas l'univers tel qu'il est.Or, c'est justement le point de départ commun.   D'autre part, c'est une fois encore ce que te reprochait Matthieu dans l'article ci-dessus : à savoir, partir du principe qu'on ne "fait de la philosophie" que sur ce qui "pose problème". Ce qui sort de l'ordinaire.  Or, les premières questions métaphysiques qui viennent à l'enfant sont "pourquoi j'existe?" et non pas "pourquoi cette soucoupe volante?",et dans l'histoire de l'humanité les premiers philosophes dont nous ayons trace se posaient des questions sur la vie, le monde, les gens, les actes et les pensées, qu'ils voyaient et expérimentaient au quotidien.   Je dirais donc, à l'inverse, que le socle premier de la philosophie, de la réflexion, voire la seule vraie réflexion valable, c'est celle qui se pose des questions sur le monde qui nous entoure, le monde "normal" et quotidien, des fondements, sa nature.   D'ailleurs se poser des questions au sujet d'apparitions de la Vierge ou de soucoupes volantes, ça n'est pas de la philosophie, ça n'est pas de la métaphysique à proprement parler, ce sont des enquêtes. Et les réponses qu'on trouve à ce genre de question ne sont valables que pour ce fait ou ces circonstances précises, et n'ont rien d'universellement applicable. (ça te dire si oui ou non c'était la Vierge ou une hallucination de schizophrène, ça te dira s'il s'agissait là, à cet endroit là, à ce moment là, de soucoupes volantes, et la conclusion s'arrête là.)     En gros, ton propos revient à ne reconnaître de valeur universelle qu'à l'enquête policière, qui pourtant te dit si cet homme précis est coupable de ce délit précis à ce moment précis, et ne te diras rien de la nature de cet homme, ni rien de chaque homme que tu croises et de tous les hommes qui font l'humanité avant et après toi.      Or, donc, la philosophie, la réflexion première, prend appuie sur les réalités concrètes, expérimentables, atteignables par la raison, et se pose des questions à leur endroit. Les questions les plus fondamentales de posent sur l'humain, sur l'univers, sur le mouvement et la perennité, sur les planètes et sur la poussière. Pas sur les apparitions ni sur les soucoupes volantes.    Mais, si on en arrive là, je peux comprendre, à la limite, que tu essayes de détourner et d'éviter la question, en la transformant complètement comme tu as fait.Puisque, en présentant les choses de la sorte, en disant qu'il faut se poser la question entre l'univers "tel que nous le voyons" et l'univers "avec dieu", tu peux encore croire tenir LA position raisonnable face à des spéculations irrecevables quoique poétiques.    Mais en revenant à la question telle qu'elle se posait, on part bien de l'univers tel que nous le connaissons, et À PARTIR DE LÀ se posent deux explications qui se retrouvent sur le même plan, à équivalence,...mais entre lesquelles il faudra bien choisir.     C'est donc l'existence de dieu ou l'univers auto-suffisant.  Tu veux écarter la première possibilité en arguant de divers points qui, c'est bien dommage, feraient également écarter la deuxième possibilité (rappelons que "univers auto-suffisant" signifie, en pratique, un univers qui se développe et existe uniquement par le hasard).Effectivement, comme tu le dis toi-même, "ton argument est que"  :1°) La seule méthode acceptable pour calculer une probabilité a priori est l'induction à partir des expériences que l'on fait, ou la déduction à partir des connaissances disponibles sur le monde :   or, l'expérience que l'on fait, justement, en pratique concrète dans l'univers tel que nous le connaissons, c'est que du hasard ne sort que du hasard. à la limite des bribes ou des briques auxquelles nous essayons de donner du sens (j'ai tiré "roi-dame-valet à la suite, qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire?"),mais en tout cas rien qui s'organise spontanément qui ne n'était déjà organisé en puissance.2°) Cette méthode, au pire, nous donne une probabilité a priori de 0 (ou 0,0000...) pour toute hypothèse qui sort du cadre de nos connaissances et de nos expériences (dont l'hypothèse théiste et dont l'hypothèse hasardiste). A fortiori si ces hypothèses sont tout bonnement invérifiables expérimentalement.     or, me semble-t-il, mais vérifier expérimentalement que l'univers apparaît et s'organise par hasard, c'est pas gagné. À moins que tu disposes à ce sujet d'informations nouvelles ? (heu, oui, un de ces jours je vous citerais la démonstration du grand Appenzeller, dans 3 mois ou jamais, en attendant considérez que j'ai répondu et que la question est réglée...?)   Il me semble bien que l'existence de dieu TOUT COMME la formation de l'univers depuis l'origine par le seul hasard, ne sont pas vérifiables expérimentalement. Tu ne peux donc pas faire un choix selon ce critère.    Et il me semble que l'intelligence organisatrice et créatrice, sort beaucoup moins du cadre des "expériences que l'on fait", que le postulat d'un hasard duquel émergeait un univers organisé.(la seule réponse à cette derrière objection étant, et tu l'as déjà utilisée toi-même : "oui mais si ça se trouve l'univers aurait pu être autrement et aussi bien organisé", ce qui d'une part ne répond pas à la question, d'autre part n'est qu'une hypothèse gratuite, alors que le fait que jeter au hasard des pierres sur un terrain vague ne donne pas naissance à une cathédrale ou une pyramide ou un Stonhenge, ressort de l'expérience courante et concrète, pour peu que l'on ait du temps à perdre à aller jeter des pierres sur un terrain vague).    Une fois reposée la question, bizarrement, la réponse ne semble plus aussi évidente à première vue.(en tout état de cause, tu te vois, en plus, dans l'obligation de fournir des explications quant au "hasard organisant", plutôt que de seulement attendre celles sur "dieu")
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M
Prendre le réel tel qu'il est, sans rien y ajouter ni retrancher, pour voir ce qu'il pré-suppose nécessairement pour être ce qu'il est comme il est : telle est ma méthode.Pour le reste de tes observations, elles trouveront leur réponse dans la suite de mes articles (réponse au commentaire n°7 dans le prochain article ; réponse à la "métaphore sur les cafards"... en bout de course!)
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M
Donc pas d'argument a contengentia mundi... puisque ta méthodologie se refuse de considérer autre chose que le réel tel qu'il est...
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M
"Je te propose moi de partir, non d’hypothèses a priori purement fictives (« et si ce qui est avait été différent ? » ; « et si ce qui est n’avait pas été » ?), mais plus simplement de la réalité objective telle qu’elle existe réellement et telle qu’elle se découvre progressivement au fil des découvertes scientifiques."Donc j'ose espérer qu'à aucun moment dans ta démarche tu ne vas t'étonner au sujet des caractéristiques de l'univers... (car un étonnement impliquerait que tu prennes en considération ces satanées hypothèses a priori contrefactuelles dont tu n'as cure, selon tes propos...). Je t'ai à l'oeil ;-)
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M
Cher Matthieu,Je n'ai pas raté ma vocation puisque je te rappelle que je suis scientifique de formation avant d'être philosophe.Attention, à ne pas mésinterpréter les termes de probabilité a priori et a posteriori. L'expérimentaliste que je suis ne tire pas les probabilités a priori d'un chapeau, contrairement à ce que suggère ton évocation (supposément à mon propos) "d’hypothèses a priori purement fictives (« et si ce qui est avait été différent ? » ; « et si ce qui est n’avait pas été » ?)". Il les tire "plus simplement de la réalité objective telle qu’elle existe réellement et telle qu’elle se découvre progressivement au fil des découvertes scientifiques." Il est important de le comprendre.Tu n'es pas sans savoir que ce qu'on observe dans le monde permet d'établir des modèles statistiques prévisionnels de ce qu'on peut encore s'attendre à observer.Il est vrai qu'a priori, il était extrêmement peu probable que j'existe mais :- je ne suis pas si exceptionnel par rapport à tous les êtres humains qui existent ;- pour savoir que j'existe, on ne se base pas sur une abduction, on m'observe.Il vaut mieux parler de probabilités inconditionnelles et conditionnelles, c'est moins ambigü. Et il faut bien garder à l'esprit que "celles-ci ne sont à chercher nulle part ailleurs que dans ce donné naturel."Amicalement,MikyPS : Il est étonnant que tu arrives le tour de force de me dire à la fois que j'aurais dû être mathématicien ou expérimentaliste et que je suis un empiriste scientiste, et en même temps que je propose des hypothèses fictives. Il est étonnant aussi que ta soi-disant analyse métaphysique concrète du réel fasse l'économie des statistiques les plus intuitives que l'on utilise dans notre quotidien (enfin je suppose : si tu vas dans une forêt française, tu t'attends davantage à croiser une biche ou un sanglier qu'un zèbre ou une antilope, rassure-moi ?).Tu devrais méditer ma métaphore sur les cafards, je la trouve très éclairante, et que tu puisses me dire en quoi ta démarche diffère de celle-ci...
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M
Cher Miky, Tu as raté ta vocation ! Ce n’est pas de la philosophie que tu aurais dû faire, mais des mathématiques ou des sciences expérimentales ! Le problème, vois-tu, c’est qu’un esprit scientifique appliqué au domaine de la métaphysique, cela donne immanquablement le positivisme, le matérialisme et le scientisme. Tes raisonnements en sont la parfaite illustration. Tu réfléchis ainsi en terme de probabilités. Je ne pense pas que ce soit la bonne méthode. Si tu t’amuses par exemple à calculer les probabilités mathématiques que tu avais de naître à partir de l’apparition de la première cellule vivante sur la terre, je crois qu’on devrait obtenir un résultat de l’ordre de 0,0000000000000000000……. (et je m’arrête là !). Bref, Miky, mathématiquement, tu ne devrais pas exister. Tu es l’un des évènements les plus improbables que la terre ait jamais porté. Malgré tout, tu existes... Je crois donc que le raisonnement probabiliste est une fausse piste, car il a le grand désavantage de rendre tout improbable et de faire douter de tout, même de ce qui existe (la meilleure preuve : quand tu dis qu’il « ne serait pas légitime d'inférer l'existence de Dieu, et cela, même si l'existence de Dieu était une explication satisfaisante à l'existence de l'Univers ! ») Non seulement ta méthode ne répond à aucune question, mais elle soulève de nombreuses autres difficultés, à l’infini… Elle n’est donc pas appropriée à notre recherche. Je te propose moi de partir, non d’hypothèses a priori purement fictives (« et si ce qui est avait été différent ? » ; « et si ce qui est n’avait pas été » ?), mais plus simplement de la réalité objective telle qu’elle existe réellement et telle qu’elle se découvre progressivement au fil des découvertes scientifiques. Dans notre recherche de la vérité, si l’on veut éviter de s’égarer sur des chemins de traverses, il est hautement recommandé de s’harnacher solidement au réel, et au seul réel connu : à savoir notre univers physique, tel qu’il est, et comme il est. C’est de lui et lui seul que nous devons partir. C’est sur lui que nous devons réfléchir. C’est lui qui doit fournir à notre humain entendement les informations à traiter, et celles-ci ne sont à chercher nulle part ailleurs que dans ce donné naturel. Nous allons donc réfléchir a posteriori sur ce donné de manière très concrète, à la lumière de notre expérience courante de la réalité objective ; c’est elle très précisément qui va nous fournir les principes de solutions aux problèmes posés par l’existence de l’univers (ce qui devrait convenir à l’empiriste logique que tu es !). Et nous verrons en appliquant rigoureusement cette méthode – l’analyse métaphysique de l’univers réel à la lumière de la réalité expérimentée par tout un chacun –, qu'il est tout-à-fait possible de résoudre infailliblement la question de l’origine de l’univers et de sa finalité.
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M
Quelques pistes de réflexion :- Montrer que l'existence de Dieu, avec les caractéristiques que tu lui prêtes, pose moins de problème que l'existence de notre univers avec les caractéristiques qui sont les siennes.- Montrer que l'existence, dans l'esprit de Dieu, de l'idée et du projet de créer l'univers tel que nous le connaissons, est moins problématique que l'existence de l'univers tel que nous le connaissons.
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M
J'ai envie de prendre une image amusante : les théologiens naturels (ou les métaphysiciens naturels si tu préfères) sont comme des gens qui ont des cafards dans leur maison (problème) et qui décident, pour les éliminer, de faire sauter leur barraque à la dynamite (solution) car ils n'ont jamais entendu parler des insecticides. Ce faisant, ils parviennent effectivement à tuer tous les cafards (problème résolu), mais au prix de la création d'un problème autrement plus lourd... qu'ils ne perçoivent même pas !... ("bah, il me reste un bout de mur, là, c'est amplement suffisant pour m'abriter et au moins je n'ai plus de cafards !").
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M
"En d’autres termes, tu ne reproches pas aux « tenants de la théologie naturelle » l’emploi de l’IME. La méthode en tant que telle est même plutôt bonne, à te lire. Non, tu leur reproches simplement d’appliquer l’IME à un problème qui ne se pose pas : à savoir, l’existence de l’univers."Autrement dit, pour faire suite à mon commentaire précédent, ce n'est pas mon seul reproche, contrairement à ce que laisse entendre cette citation.Le principal reproche pourrait se synthétiser comme suit. Admettons (pour les besoins de l'argument) que la probabilité conditionnelle (i.e. a posteriori) que l'Univers existe et soit tel qu'il est si Dieu n'existe pas soit proche de zéro. Admettons que la probabilité conditionnelle (i.e. a posteriori) que l'Univers existe et soit tel qu'il est si Dieu existe soit proche de 1. Eh bien cela ne suffirait pas à augmenter la probabilité conditionnelle (i.e. a posteriori) de l'hypothèse "Dieu" sachant que l'Univers existe et est tel et tel. Pourquoi ? Que manque-t-il ? Il manque la probabilité conditionnelle (i.e. a posteriori) de l'hypothèse "Dieu" si l'Univers n'avait pas existé ou n'avait pas été tel ou tel qu'il est. Ce n'est même pas de la métaphysique, cher Matthieu, ce sont des mathématiques ! Autrement dit, il nous manque la probabilité inconditionnelle (i.e. a priori) de l'existence de Dieu, c'est-à-dire quelque soit l'existence ou la non-existence de l'Univers ainsi que ses propriétés (et qui est égale, comme la bonne logique nous le montre, à la somme des deux précédentes probabilités). Or ceci est très génant, car si ça se trouve, l'hypothèse "Dieu" est peut-être tout aussi improbable (en termes de probabilités inconditionnelles, i.e. a priori), sinon davantage, que le fait de l'existence de notre Univers avec ses propriétés. Autrement dit, le gain explicatif serait nul voire négatif ! Tu seras d'accord avec moi qu'une hypothèse qui obscurcit plutôt qu'elle n'éclaire n'est pas une bonne hypothèse, même si elle augmente la probabilité conditionnelle (i.e. a posteriori) de ce qu'elle est supposé expliquer. Par exemple, l'existence d'un dieu du vent pourrait rendre probable (conditionnellement, i.e. a posteriori) l'existence de vents violents à tel ou tel endroit mais puisque l'existence d'un dieu du vent est inconditionnellement (i.e. a priori) encore plus étonnante que l'existence de ces vents violents, qu'elle pose encore plus de problème à notre pensée, alors on ne peut raisonnablement pas tenir cette hypothèse d'un dieu du vent comme justifiée abductivement par l'existence de ces vents violents... Il en est de même pour le cas qui nous occupe : qu'est-ce qui te fait croire que l'existence de Dieu ne pose pas encore plus de problèmes pour notre pensée que l'existence de l'Univers tel que nous le connaissons ? en quoi cette hypothèse théiste te paraît moins étonnante que le constat bien réel de l'existence de notre univers tel qu'il est ? Je n'affirme pas dogmatiquement que l'Univers n'est pas problématique, je conteste que la solution que tu veuilles lui apporter soit moins problématique que le problème qu'elle est censée résoudre.J'ajoute que contrairement à ce que tu penses, mon doute concernant la non-suffisance de l'Univers (car il s'agit bien d'un doute, je ne la nie pas dogmatiquement, je tiens à le préciser !)  n'est pas un présupposé de ma part, puisque j'amène un certain nombre d'arguments (que tu as d'ailleurs cités) à son appui.
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M
Aïe !... Cher Matthieu, je crains fort que ta critique ne s'appuie sur une mauvaise interprétation de mon article. La suffisance ou non de l'Univers est loin de constituer le pivôt de toute ma démonstration... En fait, mon article montre que même si on devait considérer que l'Univers pose un vrai problème à la pensée humaine, eh bien il ne serait pas légitime d'inférer l'existence de Dieu, et cela, même si l'existence de Dieu était une explication satisfaisante à l'existence de l'Univers !Le pivôt de ma démonstration, c'est plutôt la notion de probabilité a priori.Mon argument est que :1°) La seule méthode acceptable pour calculer une probabilité a priori est l'induction à partir des expériences que l'on fait, ou la déduction à partir des connaissances disponibles sur le monde.2°) Cette méthode, au pire, nous donne une probabilité a priori de 0 (ou 0,0000...) pour toute hypothèse qui sort du cadre de nos connaissances et de nos expériences (dont l'hypothèse théiste). A fortiori si ces hypothèses sont tout bonnement invérifiables expérimentalement. Au mieux, cette méthode n'est pas adaptée et donc la probabilité a priori de ces hypothèses est incalculable.3°) Par conséquent, on ne peut donc pas calculer de probabilité a posteriori de ces hypothèses, ou alors elle sera nulle également.Amicalement,Miky
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