7 novembre 2010 7 07 /11 /novembre /2010 13:02

Cet été, au cours de ma retraite au sanctuaire de Notre Dame de Monligeon, une dame vient me voir et me dit :

 

Vraiment, je suis admirative de votre foi, de la manière dont vous la vivez. Je suis impressionnée par votre ferveur, votre recueillement, votre piété…

 

Evidemment, j’étais un peu gêné par tant de dithyrambes. Surtout que je n’avais pas l’impression d’être aussi rayonnant que cela…

 

– Je me sens toute petite quand je vous vois, poursuit la dame. J’ai 70 ans, et je suis loin d’en être là où vous êtes. Comme j’aimerais avoir ne serait-ce qu’un peu de votre foi…

 

Elle me fait part alors de ses difficultés à croire. Elle va même jusqu’à me dire qu’elle n’a pas la foi !

 

Je doute tellement… Comment savoir si tout cela est bien réel, si ce n’est pas de l’auto-suggestion ?

 

Elle me demande un conseil pour croire davantage.

 

Je lui dis alors :

 

Je ne crois pas que vous n’ayez pas la foi. La foi, vous l’avez : sinon, vous ne seriez pas ici, en ce lieu de prière ; vous ne vous seriez pas inscrite à la retraite ; vous ne participeriez pas aux offices. Si vous faites tout cela, c’est que vous avez la foi !

 

La dame semble dubitative.

 

Votre foi me paraît même plus héroïque que la mienne, parce que vous croyez dans la "nuit obscure". Tandis que moi, il est vrai que le Seigneur me gratifie de grandes grâces sensibles en ce temps de retraite : je me sens porté. Il est donc plus facile pour moi de croire… Mais comprenez que vous n’avez pas moins la foi que moi. Vous l’avez même sans doute plus grande que moi.

 

Je lui parle alors de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, en lui rappelant qu’elle aussi a connu, à la fin de sa vie, de grandes tentations contre la foi. Elle aussi avait l’impression que le ciel était vide, et que Dieu n’existait pas. C’est alors qu’elle a multiplié les actes de foi, comme jamais elle ne l’avait fait auparavant. « Je crois, disait elle, parce que je veux croire. »

 

« Ma Mère bien-aimée, écrit-elle dans l’Histoire d’une âme, je vous parais peut-être exagérer mon épreuve ; en effet si vous jugez d’après les sentiments que j’exprime dans les petites poésies que j’ai composées cette année, je dois vous sembler une âme remplie de consolations et pour laquelle le voile de la foi s’est presque déchiré, et cependant… ce n’est plus un voile pour moi, c’est un mur qui s’élève jusqu’aux cieux et couvre le firmament étoilé… Lorsque je chante le bonheur du Ciel, l’éternelle possession de Dieu, je n’en ressens aucune joie, car je chante simplement ce que je veux croire. Parfois, il est vrai, un tout petit rayon de soleil vient illuminer mes ténèbres, alors l’épreuve cesse un instant, mais ensuite le souvenir de ce rayon, au lieu de me causer de la joie, rend mes ténèbres plus épaisses encore. » (Manuscrit C, Folio 8, Recto)

 

La dame m’écoute attentivement.

 

En fait, m’enhardis-je, je pense que ce n’est pas avec la foi que vous avez un problème, mais avec la raison. Car les objections qui peuplent votre esprit peuvent être combattues aisément par un travail intellectuel. Vous verriez alors que les raisons de croire sont infiniment plus nombreuses et plus convaincantes que les raisons de ne pas croire.

 

Je lui évoquais le cas du Père Molinié, qui révélait que sa foi était si bien enracinée dans sa raison, que pour qu’il perde vraiment la foi, il faudrait qu’il en vienne aussi à perdre la raison !

 

Je l’invitais donc à lire des ouvrages de métaphysique et de théologie pour approfondir tel ou tel aspect de sa foi lui posant problème. Cela tombait bien d’ailleurs, puisque notre retraite était prêchée par le Père Descouvemont. Je lui suggérais donc ses excellents livres (tel son magistral « Guide des difficultés de la foi catholique »), et bien sûr, de ne pas hésiter à aller le voir pour l’interroger sur telle ou telle question lui faisant difficulté.

 

De cet entretien, je retiens l’importance de la démarche intellectuelle dans la vie de foi. Un chrétien ne peut pas faire l’économie de bonnes et saintes lectures. C’est vraiment quelque chose de vital. Une foi non enracinée dans la raison reste à la merci de la première bourrasque – de la moindre contradiction. Il est vraiment capital que nous nourrissions notre âme avec des aliments spirituels : l’Ecriture sainte, bien sûr, au premier chef, avec ses commentaires (il en existe de nombreux remarquables tels ceux de Marie-Noëlle Thabut, du P. Sonet...). Mais pas seulement : la vie et les écrits des saints peuvent puissamment nourrir notre vie spirituelle, de même que les documents du Magistère et certains ouvrages de métaphysique, de théologie, d’apologétique, d’histoire de l’Eglise… Il ne faut pas hésiter à fréquenter habituellement une librairie religieuse, et à fureter dans ses rayons  même s'il est souhaitable et prudent de se faire conseiller par quelqu’un de confiance, car malheureusement, il existe aussi des livres qui peuvent nous faire du mal…

 

A l’ère des communications modernes, il existe également de nombreuses manières de se cultiver par internet. On y trouve ainsi de nombreux cours disponibles, téléchargeables, dispensés par des professeurs de grande qualité ; des enseignements divers audios et vidéos. Il existe des radios chrétiennes, avec des émissions très édifiantes (en podcasts)...

 

Et peut-être dans votre ville trouverez-vous des conférences, des débats et discussions, des occasions de rencontre avec des prêtres, des théologiens, des philosophes…

 

Il est vraiment important pour un chrétien de lire (ne serait-ce que des magazines!), écouter, réfléchir, approfondir, chercher, questionner, écrire peut-être… La pire des choses, quand on a des objections (et on en a tous !), c’est de les mettre de côté – de faire comme si elles n’existaient pas, en pensant que notre foi suffira à les surmonter (ou en considérant que notre foi se situant au-delà de la raison, elle n'a pas à être en phase nécessairement avec notre raison – c'est l'erreur du fidéisme).

 

Il ne faut pas faire violence à notre raison, en lui imposant des choses qu’elle ne peut pas accepter… Car le retour de bâton pourrait être extrêmement douloureux. Il existe certes des mystères dans notre foi que notre raison ne peut comprendre pleinement. Mais pour adhérer à ces mystères, encore faut-il que nous ayions... des raisons de le faire.

 

L’homme est fait pour croire et penser sa foi avec sa raison. Si la foi vient à manquer, la raison se heurte à ses propres limites, elle tâtonne et finit par "dévisser"... ; et si la raison n’est pas nourrie, la foi se trouve à la merci de tous les courants d’idées : elle s’expose à être ballotée « à tout vent de doctrine » (cf. Ep 4. 14-15), à être la proie des sectes et des superstitions – ou à dégénérer en athéisme larvé, sous couvert d'un vernis religieux (voire en athéisme tout court!).

 

Réglons donc notre pensée sur l’enseignement solide reçu de l’Eglise « dans la foi et l’amour que nous avons en Jésus-Christ » (cf. 2 Tm 1. 13). Et comme dirait le P. Guy Gilbert : bûchons notre foi !

 


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Publié par Matthieu BOUCART -
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