28 décembre 2010 2 28 /12 /décembre /2010 13:19

Extrait du discours du Pape Benoît XVI aux cardinaux et à la curie romaine, le 21 décembre 2009.

 

Comme je l'ai déjà dit, le thème dusynode désigne trois grandes paroles fondamentales de la responsabilité théologique et sociale : réconciliation — justice — paix. On pourrait dire que réconciliation et justice sont les deux présupposés essentiels de la paix et qu'ils définissent également dans une certaine mesure sa nature. Limitons-nous à la parole « réconciliation ». Un regard sur les souffrances et les difficultés de l'Histoire récente de l'Afrique, mais également dans de nombreuses autres régions de la terre, montre que les oppositions non résolues et profondément enracinées peuvent conduire, dans certaines situations, à des explosions de violence dans lesquelles tout sens d'humanité semble avoir disparu. La paix ne peut se réaliser que si elle conduit à une réconciliation intérieure. Nous pouvons considérer comme un exemple positif d'un processus de réconciliation en voie de réussite l'Histoire de l'Europe après la deuxième guerre mondiale. Le fait que depuis 1945, en Europe occidentale et centrale, il n'y a plus eu de guerre se fonde certainement de façon déterminante sur des structures politiques et économiques intelligentes et éthiquement encadrées, mais celles-ci n'ont pu se développer que parce qu'existaient des processus intérieurs de réconciliation qui ont rendu possible une nouvelle coexistence. Chaque société a besoin de réconciliation, afin qu'il puisse y avoir la paix. Les réconciliations sont nécessaires pour une bonne politique, mais ne peuvent être réalisées uniquement par celle-ci. Il s'agit de processus pré-politiques et ils doivent provenir d'autres sources.

 

Le synode a cherché à examiner en profondeur le concept de réconciliation comme devoir pour l'Eglise d'aujourd'hui, en attirant l'attention sur ses différentes dimensions. L'appel que Saint Paul a adressé aux Corinthiens possède véritablement aujourd'hui une nouvelle actualité. « Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c'est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu » (2 Co 5, 20). Si l'homme n'est pas réconcilié avec Dieu, il est également en opposition avec la Création. Il n'est pas réconcilié avec lui-même, il voudrait être un autre que celui qu'il est et par conséquent il n'est pas non plus réconcilié avec son prochain. En outre, la capacité de reconnaître sa faute et de demander pardon — à Dieu et à l'autre — fait partie de la réconciliation. Et enfin, la disponibilité à la pénitence, la disponibilité à souffrir jusqu'au bout pour une faute et à se laisser transformer, appartient au processus de réconciliation. Et la gratuité, dont l'encyclique Caritas in veritate parle à plusieurs reprises, en fait partie : la disponibilité à aller au-delà du nécessaire, à ne pas faire de calculs, mais à aller au-delà de ce que demandent les simples obligations juridiques. Cette même générosité avec laquelle Dieu lui-même nous a donné l'exemple en fait partie. Pensons aux paroles de Jésus : « Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande sur l'autel, si, là, tu te souviens que ton frère à quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l'autel, va d'abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande » (Mt 5, 23sq). Dieu qui savait que nous ne sommes pas réconciliés, qui voyait que nous avons quelque chose contre Lui, s'est levé et est venu à notre rencontre, bien que Lui seul ait été du côté de la raison. Il est venu à notre rencontre jusqu'à la Croix, pour nous réconcilier. Telle est la gratuité : la disponibilité à faire le premier pas. Aller les premiers à la rencontre de l'autre, lui offrir la réconciliation, assumer la souffrance que comporte le renoncement à avoir raison. Ne pas céder dans la volonté de réconciliation : c'est de cela que Dieu nous a donné l'exemple et c'est la façon de devenir semblables à Lui, une attitude dont nous avons toujours à nouveau besoin dans le monde. Nous devons aujourd'hui être en mesure d'apprendre à nouveau à reconnaître la faute, nous devons nous ôter l'illusion d'être innocents. Nous devons être en mesure d'apprendre à faire pénitence, à nous laisser transformer ; à aller à la rencontre de l'autre et à nous faire donner par Dieu le courage et la force pour un tel renouvellement. Dans notre monde d'aujourd'hui, nous devons redécouvrir le sacrement de la pénitence et de la réconciliation. Le fait que celui-ci ait en grande partie disparu des habitudes existentielles des chrétiens est le symptôme d'une perte de véracité à l'égard de nous-mêmes et de Dieu ; une perte, qui met en danger notre humanité et qui réduit notre volonté de paix. Saint Bonaventure était de l'opinion que le sacrement de la pénitence était un sacrement de l'humanité en tant que tel, un sacrement que Dieu avait déjà institué dans son essence immédiatement après le péché originel avec la pénitence imposée à Adam, même s'il n'a pu obtenir sa forme complète que dans le Christ, qui est de manière personnelle la force réconciliatrice de Dieu et qui a pris sur lui notre pénitence. En effet, l'unité entre faute, pénitence et pardon est l'une des conditions fondamentales de la véritable humanité, des conditions qui atteignent leur forme complète dans le sacrement, mais qui, à partir de leur racine, font partie du fait d'être des personnes humaines comme telles. Le synode des évêques pour l'Afrique a donc à juste titre inclus dans ses réflexions également les rituels de réconciliation de la tradition africaine comme lieux d'apprentissage et de préparation pour la grande réconciliation que Dieu donne dans le sacrement de la pénitence. Mais cette réconciliation requiert le vaste « espace » de la reconnaissance de la faute et de l'humilité de la pénitence. La réconciliation est un concept pré-politique et une réalité pré-politique, qui précisément pour cette raison est de la plus grande importance pour la tâche de la politique elle-même. Si l'on ne crée pas dans les cœurs la force de la réconciliation, le présupposé intérieur manque à l'engagement politique pour la paix. Lors du synode, les pasteurs de l'Eglise se sont engagés en vue de cette purification intérieure de l'homme qui constitue la condition préliminaire essentielle à l'édification de la justice et de la paix. Mais cette purification et cette maturation intérieure vers une véritable humanité ne peuvent pas exister sans Dieu.

 

 

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Publié par Matthieu BOUCART -
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