30 novembre 2008 7 30 /11 /novembre /2008 18:00

Chers amis lecteurs,

 

Je souhaiterais approfondir ma réflexion sur le Purgatoire en l’élargissant aux questions de la réparation, du feu purificateur et de la Justice de Dieu.

 

Le Purgatoire, avons-nous dit, est le « lieu » dans lequel nous acquittons notre dette « jusqu’au dernier sou » avant d’aller au Ciel – pour reprendre l’image de Jésus dans le sermon sur la Montagne (cf. Mt 5. 25-26).

 

Quelle est donc cette « dette » que nous devons « payer » ? Que devons-nous « réparer » par nos œuvres de pénitence ici-bas, ou dans l’au-delà du Purgatoire ? Et pourquoi cette exigence de « réparation » ? Le Seigneur n’a-t-il donc pas acquitté pleinement sur la Croix la dette de notre péché (Cf. Col 2. 14)? Que peut-on ajouter à l’œuvre de Dieu ?

 

La dette que le Seigneur nous demande d’acquitter, dirais-je, n’est pas tant celle du péché – que le Seigneur a comblé en surabondance par son sacrifice d’amour sur la Croix –, que celle de « l’amour mutuel » (cf. Rm 13.8), la seule dette que St Paul nous demande d’avoir les uns pour les autres, et que la justice nous commande d’avoir envers ce Dieu qui nous a tant aimé, et dont l’Amour miséricordieux manifesté en Jésus-Christ appelle notre propre réponse d’amour...

 

La vie du Ciel n’est autre qu’une participation à la nature divine (cf. 2 P 1. 4) qui est substantiellement Amour (cf. 1 Jn 4. 8) ; une vie où l’Amour se donne intégralement, se reçoit totalement, et se livre pleinement en retour… sans la moindre ombre d’égoïsme ou de retour sur soi. Au Ciel, tout notre être sera entièrement donné à tous et à Dieu, et tout notre être recevra tout de tous et de Dieu. Nous vivrons dans une communion d’amour dont nous n’avons pas idée sur cette terre, avec une intensité à laquelle beaucoup ne seront sans doute pas suffisamment préparé ici-bas... Le Purgatoire achèvera donc en nous ce que nous aurons commencé sur cette terre : à savoir, transformer notre cœur pour devenir un peu plus à l’image et à la ressemblance de ce Dieu d’Amour qui nous a faits (cf. Gn 1. 26) et qui nous appelle à vivre en Lui.

 

Le seul obstacle au plein accomplissement de notre être dans l'Amour, c'est le péché. Tout péché volontaire a pour effet un rétrécissement de notre charité, de notre capacité à aimer ; un engourdissement de nos sens spirituels. Le Pardon obtenu, il conviendra de retrouver le goût de l'amour ; de nous réapprendre à entendre la Parole de Dieu résonner dans le fond de notre coeur ; de nous ré-habituer à sentir la bonne odeur du Christ (cf. 2 Co 2.15) et à voir le Seigneur dans nos frères et dans les évènements ; de nous appliquer à toucher le Coeur de Dieu par notre vie de foi (cf. Rm 1. 17). Tout cela implique une rééducation, un travail sur soi, qui n'est pas immédiatement impliqué dans le Pardon de Dieu, mais qui en découle directement. La grâce sacramentelle du Pardon est certes porteuse de guérison ; mais elle ouvre aussi la voie à une exigence qui peut paraître superfétatoire à première vue, mais qui, tout bien réfléchi, est une véritable libération pour l’homme : cette exigence, c’est celle de la réparation, de la satisfaction, qui participe de cette rééducation à la vie de foi, d'espérance et de charité.

 

Je voudrais citer ici un important – et long – passage du livre du Père Bernard Bro, dominicain, sur le Sacrement de la Réconciliation : "On demande des pécheurs".

 

« Il faut d’abord reconnaître honnêtement que, par le péché, un désordre a été commis et qu’il demeure. L’histoire humaine se construit dans la conscience des hommes, nos actes ne sombrent pas dans le néant. Cette Histoire est appelée à témoigner de la puissance de bonté de l’Esprit présent en chacun. Et tout péché, à son point précis dans la trame du temps, demeure à jamais comme un échec à l’Ordre, à la Bonté, à la Gloire de Dieu qui devrait se refléter dans la totalité de l’Histoire.

 

« Alors, pour éviter le désordre, on peut, comme le Grand Inquisiteur de Dostoïovsky, supprimer la liberté. Ou bien, au contraire, avec le Christ, renforcer la liberté : redonner à l’homme pouvoir de récupérer, de reprendre son passé, renforcer le pouvoir créateur de bonté dont il est capable.

 

« Il y a eu échec à l’amour, échec à Dieu. L’acte est indestructible, c’est vrai et à jamais : à tel moment, l’égoïsme, la lâcheté m’ont dominé. Mais mon histoire, elle, se poursuit. Ma liberté n’a pas dit son dernier mot, et par la grâce du Christ, justement celle de la confession, elle a encore les moyens de protester contre cet échec à l’Amour. J’ai ce pouvoir inouï de réintégrer mon histoire à celle de la Gloire de Dieu, en dépassant cet acte mauvais, en le jugeant selon la vérité et en l’inscrivant dans un avenir recréateur par des actes nouveaux, exprès, compensateurs du passé.

 

« Telle est la « satisfaction » : merveilleuse occasion offerte à la dignité de l’homme de reprendre son passé. Il y a un décalage entre moi et mon histoire, entre ma personne et mes actes. Mes actes m’engagent, certes, mais une fois accomplis, ils m’échappent, ils s’accumulent derrière moi, ils s’enchaînent dans ma mémoire et dans la mémoire de Dieu pour former mon histoire ; et pourtant, je peux sans cesse dépasser mon histoire, la juger, et en changer le sens total, la valeur, par de nouveaux actes.

 

« Le pécheur réconcilié à Dieu, dans sa personne, traîne pourtant dans son histoire un échec à Dieu, à l’amour. Il a manqué à un moment de son histoire à l’ordre de la bonté, de la création de vie qui devait se refléter dans toute l’histoire humaine, et alors, la charité retrouvée, l’amitié de Dieu nous presse de réparer ce manque.

 

« Il ne s’agit donc pas du tout d’une « taxe », d’un « tarif », mais sans doute de la plus belle victoire de la liberté : l’homme, restauré dans sa dignité, a assez de force, non seulement pour demander son pardon, comme la femme adultère ou Saint Pierre, mais, une fois pardonné, pour coopérer à la restauration de cette amitié.

 

« C’est dans l’amour que j’ai pour moi-même que Dieu m’appelle à intervenir, en me proposant de « réparer ». Il n’y a pas d’amitié sans partage, sans un échange (et donc une justice), et en sauvegardant cet échange et cette justice, je sauve l’amitié.

 

« Par le péché, j’ai porté atteinte à cet échange et, du même coup, je n’ai pas seulement atteint celui qui me faisait confiance dans ce partage en blessant son amitié, mais encore je suis allé contre l’ordre de la justice qui fondait mon amitié.

 

« C’est ici que se comprend toute la grandeur de la réparation : puisque je ne peux pas reconstruire ce que j’ai abîmé, je vais faire beaucoup plus, je vais offrir non pas ce que je ne peux plus « réparer », puisque c’est détruit, mais ma volonté, ma « bonne » volonté. Je rentre en grâce auprès de l’offensé en découvrant qu’il me propose de l’aimer à neuf. Alors, pour réparer, je viens me soumettre à ses conditions, en lui demandant de fixer lui-même ces conditions. Dans une délicatesse infinie, Dieu accepte de tenir compte de ma dignité, de ma liberté, de mon pouvoir recréateur de bonté.

 

« Quand un enfant a détruit quelque objet de valeur, il est bien incapable de le restituer. Deux solutions se présentent : son père pardonne, oublie, mais répare seul en acquérant un objet semblable ; ou bien il propose à son fils de coopérer, ne serait-ce que pour une part infime, à la reconstitution de l’objet détruit. Ainsi, c’est en ami réconcilié, c’est de l’intérieur même de l’amitié divine, en épousant ses lois secrètes, que le pécheur accomplit sa réparation, et non pas comme s’il fallait payer une amende, une taxe fixée de l’extérieur.

 

« Et finalement, le meilleur signe du pardon, ne serait-ce pas qu’il me rend heureux (d’être heureux) de réparer, non pas selon ma justice à moi, mais selon une confiance absolue en Celui « qui sait bien de quoi nous sommes faits » ?

 

« Si cette doctrine est vraie, poursuit le Père Bro, il est grave et coupable de la minimiser. En effet, cette doctrine de la réparation est tellement essentielle au christianisme que, sans elle, il ne serait plus rien, puisque notre salut, tout entier, est le fruit d’une réparation : celle du Christ (…).

 

« En nous invitant au partage de sa vie, et en vertu du même amour qui l’a fait monter sur la Croix, Dieu nous appelle (et ceci pour nous donner davantage) à participer à la réparation elle-même, en achevant dans notre corps que qui manque à la Passion de son Fils. On peut se sentir faible devant une telle perspective : c’est encore mal la comprendre. Il a voulu et veut encore « sauver les pécheurs par les pécheurs » de façon que les pécheurs participent à tous les privilèges de l’innocence, y compris celui-là. Cette doctrine de la réparation affirme donc que le sauvé n’est pas à part du sauveur, mais qu’il est sauvé au point d’être invité à devenir sauveur.

 

« Dans le christianisme, il sauve en participant à la Rédemption elle-même qui est la réparation d’un amour brisé. Quoiqu’on en dise, il y a une dette à payer, mais loin d’être contre l’amour, cette exigence provient de l’amour même. Ce qui répare un amour et réconcilie ceux qui on rompu, c’est de pleurer ensemble sur le mal qui a été fait, ce sont les larmes versées sur cette rupture. »

 

 

En méditant sur cette question de la réparation et sur ce très beau texte du Père Bernard Bro, quelques images me sont venues à l’esprit. Je vous les livre telles qu’elles, en étant bien conscient de leurs limites. Elles peuvent nous aider, je pense, à mieux comprendre en quoi consiste la réparation selon l'Evangile.

 

La première image qui m’est venue est celle de la page blanche. Le Pardon de Dieu, on le sait, efface nos fautes. Nous voilà donc redevenus blancs comme neige (cf. Is 1. 18), tels que nous étions le jour de notre baptême. Mais voilà : Dieu ne nous pardonne pas pour faire de nos vies une page blanche. Il attend de nous que nous réécrivions avec Lui un nouveau chapitre de notre histoire, une nouvelle page d’Amour. Comme disait Bossuet (c’est une citation reprise par le Père Bro dans son livre) : « Quand Dieu efface, c’est qu’il va écrire quelque chose »

 

Deuxième image : le Pardon de Dieu nous sauve de l’égarement du péché, et nous remet sur la bonne route, dans la bonne direction. Mais maintenant, il faut marcher… C’est la marche, pourrait-on dire, qui parachève l’œuvre du Pardon de Dieu. Sans cette marche, le Pardon ne peut déployer tous ses effets ; il manque encore quelque chose. Certes, le Pardon nous a sauvé et restauré dans la grâce de Dieu. Et cela nous suffit sans doute… Mais pas pour Dieu ! Si le Pardon nous est donné, ce n’est pas seulement pour notre satisfaction personnelle ; c’est pour que nous marchions sur la route de l’Amour et que nous illuminions la vie de nos frères (cf. Mt 5. 14.16). La grâce du Salut n’est jamais donnée pour soi-même seulement. Elle est aussi donnée pour les autres et le bonheur de tous. Voilà pourquoi la réparation est si essentielle : elle nous remet en marche avec Dieu sur la route de l’Evangile qui nous conduit tout droit à nos frères. C'est par nous que Dieu veut répandre sa Paix dans le monde entier. C'est par nous et à travers nous qu'il veut se rendre présent aux hommes de ce monde. Alors il faut se mettre en marche. C'est ainsi d'ailleurs qu'André Chouraki traduisait l'expression "Heureux" dans les Béatitudes : "En marche"! Yalla!

 

La troisième image qui m’est venue à l’esprit en réfléchissant sur ce sujet de la réparation, est celle de l’homme qui coule à pic dans l'océan. Le péché, pourrait-on dire, nous enfonce toujours un peu plus, il nous fait couler, couler, couler, toujours plus profondément… Le Pardon de Dieu stoppe cette chute, et nous redonne le dynamisme de vie pour remonter vers la surface. Nous pouvons ainsi prendre appui sur la terre ferme et nous propulser de nouveau vers le haut. Mais le Royaume de l’Amour se trouve à la surface de l’eau. La réparation correspond précisément à cette remontée vers la surface où se trouve la plénitude de l’air, et où je pourrai respirer de nouveau à pleins poumons l’oxygène de l’Amour de Dieu ; sortir des ténèbres des fonds marins pour retrouver la chaleur du Soleil de Justice. La réparation me fait re-parcourir en sens inverse le chemin du péché qui m’a fait descendre jusqu’au fond. Cette remontée peut être longue et pénible, le péché m’ayant peut-être fait descendre très bas, mais la main de Dieu peut intervenir spécialement pour hâter ma remontée : c’est ce qui se passe lorsque nous recevons du Seigneur le don de l’Indulgence.

 

Autre image : celle de l’escalier et de l’ascenseur. Le Seigneur Jésus est la Porte qui nous mène au Ciel. Tous ceux qui franchissent cette Porte sont sauvés (cf. Jn 10. 9). Mais derrière la porte, il y a une ascension à vivre, une montée vers le Ciel de Dieu (qui est élevé, très élevé pour les petites créatures que nous sommes, puisque c’est le lieu de l’Amour absolu). Pour monter, il y a deux moyens : l’escalier ou l’ascenseur. L’escalier est long et pénible à franchir ; il figure la pénibilité des actes de pénitences ici-bas et des souffrances du Purgatoire. L’ascenseur nous fait parvenir au Ciel sans effort. Or, Petite Thérèse nous dit que l’ascenseur, ce sont les bras de Jésus. Eh bien voilà ce qui se produit quand l’âme bien disposée – ou l’âme défunte à qui l’on fait ici-bas ce cadeau – reçoit l’indulgence : elle prend l’ascenseur des bras de Jésus, et monte directement au Ciel en s’épargnant la peine de la rude montée par l’escalier…

 

Dernière image, que m’a suggéré le texte du Père Bernard Bro : celle de la consolation. Le Pardon sèche les larmes de pénitence de l’offenseur ; la réparation rend le sourire à l’offensé.

 

Bien entendu, ce n’est pas la souffrance de l’âme dans le feu du Purgatoire qui apaise l’offensé ! Comme si Dieu prenait plaisir à faire passer sa créature par le creuset de la souffrance pour lui faire « payer » son droit d’entrée dans le Paradis. Non, notre Dieu n’est pas sadique, et ce n’est pas ainsi qu’il faut comprendre le Purgatoire où la réparation opère différemment qu’ici-bas. La réparation dans le Purgatoire n’a pas pour finalité de faire produire à l’âme des actes de charités qu’elle n’a pas pu ou pas voulu réaliser sur la terre. L’âme souffrante au Purgatoire ne peut plus engranger de mérites, ni faire le bien. Sa souffrance est purement passive. Mais le feu du Purgatoire accomplit à la perfection et définitivement ce que les œuvres de réparation sur cette terre contribuent à réaliser dans le cœur de l’homme pécheur (et qui demeure tel dans la condition humaine d’ici-bas) : à savoir, la dilatation de son cœur et de sa capacité à recevoir tout l’amour du Ciel pour vivre éternellement de cet amour sans le moindre retour sur soi.

 

Mais pourquoi alors le tourment du feu ? Pourquoi ce supplice horrible qui est, aux dires de St Augustin, « plus terrible que toutes les souffrances qu'un homme puisse endurer en cette vie. » Le Pape Benoît XVI, dans sa dernière encyclique « Spe Salvi » nous aide à mieux comprendre ce mystère.

 

« Certains théologiens récents, écrit le Saint Père, sont de l'avis que le feu qui brûle et en même temps sauve est le Christ lui-même, le Juge et Sauveur. La rencontre avec Lui est l'acte décisif du Jugement. Devant son regard s'évanouit toute fausseté. C'est la rencontre avec Lui qui, en nous brûlant, nous transforme et nous libère pour nous faire devenir vraiment nous-mêmes. Les choses édifiées durant la vie peuvent alors se révéler paille sèche, vantardise vide et s'écrouler. Mais dans la souffrance de cette rencontre, où l'impur et le malsain de notre être nous apparaissent évidents, se trouve le salut. Le regard du Christ, le battement de son cœur nous guérissent grâce à une transformation assurément douloureuse, comme « par le feu ». Cependant, c'est une heureuse souffrance, dans laquelle le saint pouvoir de son amour nous pénètre comme une flamme, nous permettant à la fin d'être totalement nous-mêmes et par là totalement de Dieu (…). Au moment du Jugement, nous expérimentons et nous accueillons cette domination de son amour sur tout le mal dans le monde et en nous. La souffrance de l'amour devient notre salut et notre joie. Il est clair que la « durée » de cette brûlure qui transforme, nous ne pouvons la calculer avec les mesures chronométriques de ce monde. Le « moment » transformant de cette rencontre échappe au chronométrage terrestre – c'est le temps du cœur, le temps du « passage » à la communion avec Dieu dans le Corps du Christ. »

 

Voilà qui nous éclaire sur le feu du Purgatoire ! Ce feu, nous dit Benoît XVI, n’est autre que Dieu lui-même, dont l’Ecriture nous révèle qu’il est un « feu dévorant » (He 12. 29). Dès lors, on peut imaginer que les âmes des défunts sont toutes dans le feu de l’Amour de Dieu, mais que ce feu agit différemment sur elles selon leur état spirituel. Les âmes des damnées brûlent de douleur dans ce feu de l’Amour de Dieu qui leur est insupportable ! Les âmes du Purgatoire souffrent à mesure que se consument en elles les imperfections et autres saletés. Les âmes du Paradis brûlent d’amour dans ce feu (à l’instar d’Ananias, Azarias et Misaël dans l’Ecriture – cf. Daniel 3), et chantent les louanges de Dieu dans une exultation perpétuelle.

 

Bien sûr, ce ne sont là que quelques images, qui ne rendent pas compte de la réalité qui nous attend au Ciel et qui est bien au-delà de ce que nous pouvons imaginer ici-bas. Mais elles nous aident à comprendre que si le feu du Purgatoire est le Cœur de Jésus lui-même, la sortie du Purgatoire ne peut pas être la sortie du Cœur de Jésus, mais un changement d’état dans ce Cœur de l’Amour éternel. Quand on devient soi-même une flamme d’amour, on ne souffre plus dans le feu de l’Amour divin.

 

Reste la question de la Justice. Dans son petit Journal, Sainte Faustine, après avoir « visité » le Purgatoire et avoir été témoin, dans une vision surnaturelle, de ses terribles supplices, reçu cette parole de Jésus : « Ma miséricorde ne veut pas cela, mais la justice l'exige. » (cf. Petit Journal, § 20).

 

Cette parole m’a beaucoup fait réfléchir. Quelle est donc cette Justice qui semble s’opposer à la Miséricorde divine au point de triompher d’elle, au moins temporairement dans le Purgatoire ?

 

C’est le Cardinal Lustiger qui m’a instruit sur cette question là, dans son très beau livre sur le bonheur, et sa méditation de la 4e béatitude : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la Justice, ils seront rassasiés ».

 

« Il ne s’agit pas ici d’avoir et de faire la justice dont on peut rêver, mais d’être juste. La justice dont parle Jésus caractérise celui ou celle qui est juste devant Dieu (…). Cette justice, qui est donc le fait d’être juste, ne repose pas seulement – ni d’abord – sur l’idéal humain d’équité, mais correspond à une conformation de l’homme à Dieu Lui-même. Cette « Justice de Dieu » prend les figures de la perfection et de la sainteté, et ce sont précisément là les « qualités » que l’homme est invité à revêtir (…). Lorsque l’homme est « justifié » ou « sanctifié », lorsqu’il devient parfait aux yeux de Dieu, il est rendu semblable au Fils de Dieu Lui-même. »

 

Si l’on remplace le mot « Justice », dans la parole de Jésus adressée à Sainte Faustine, par le mot « Sainteté », nous commençons à mieux comprendre ce qui se joue dans le Purgatoire – la « conformation de l’homme à Dieu Lui-même » : « Ma miséricorde ne veut pas cela, mais ma Sainteté l’exige ». Dieu a beau aimer, il ne peut pas se « renier » lui-même, et faire qu’il soit autre que ce qu’il est : un feu dévorant, le Trois fois Saint. Cela dit, sa Miséricorde peut apaiser voire mettre un terme aux souffrances causées par ce feu en hâtant la transformation de l’âme en flamme d’amour : telle est la grâce qui nous est faite par le don de l’Indulgence ; grâce que nous pouvons nous appliquer à nous-même ou offrir à nos défunts, spécialement en cette Année Saint Paul.

 

Ne négligeons donc pas ces moyens que le Seigneur nous accorde pour grandir en sainteté : cette grâce qui nous est faite ici-bas d’obtenir Miséricorde et Pardon dans le Sacrement de la Réconciliation (la Confession) – en particulier à l’approche de Noël ; et mettons notre joie dans les œuvres de réparation et de pénitence que nous pourrons réaliser en ce temps de l’Avent pour préparer notre Cœur à recevoir le Seigneur ; redécouvrons en particulier ce trésor des Indulgences qui est grand ouvert en cette année Saint Paul ; apprenons à les recevoir régulièrement pour nous-même et à en offrir pour nos chers défunts. Nous pourrons alors entrer dans la joie de notre Maître, lorsque celui-ci viendra.

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Publié par Matthieu BOUCART -
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