29 mai 2008 4 29 /05 /mai /2008 13:39

Extrait du Message adressé par le Pape Benoît XVI aux Evêques, aux prêtres et aux fidèles catholiques du Moyen-Orient, le 21 décembre 2006.

(…) Je m'adresse avec affection aux communautés qui sont et se sentent un "petit troupeau", que ce soit à cause du nombre réduit de frères et de soeurs (cf. Lc 12, 32), ou parce qu'elles vivent dans des sociétés composées d'une large majorité de croyants d'autres religions, ou bien encore en raison des circonstances présentes, où certaines de vos nations d'appartenance traversent de sérieux problèmes et difficultés. Je pense avant tout aux pays marqués par de fortes tensions et souvent soumis à des épisodes d'une terrible violence qui, en plus de causer de graves destructions, frappent sans pitié des personnes sans défense et innocentes. Les nouvelles quotidiennes qui arrivent du Moyen-Orient ne font que montrer une aggravation de situations dramatiques, presque sans issue. Ce sont des événements qui suscitent naturellement chez ceux qui s'y trouvent impliqués de la protestation et de la colère et qui prédisposent les âmes à une volonté de revanche et de vengeance.

Nous savons que ce ne sont pas là des sentiments chrétiens ; y céder rend intérieurement durs et rancuniers, bien loin de cette "douceur et humilité" dont le Christ s'est voulu le modèle (cf. Mt 11, 29). L'on perdrait ainsi l'occasion d'offrir une contribution proprement chrétienne à la solution des très graves problèmes de notre époque. Il ne serait en aucun cas raisonnable, en particulier en ce moment, de perdre du temps à s'interroger sur qui a le plus souffert ou de vouloir présenter le compte des torts subis, en énumérant les raisons qui militent en faveur de la thèse de chacun. Cela a souvent été fait par le passé, avec des résultats pour le moins décevants. La souffrance, au fond, est commune à tous, et lorsque quelqu'un souffre, il doit ressentir avant tout le désir de comprendre combien peut souffrir l'autre qui se trouve dans une situation analogue. Le dialogue patient et humble, fait d'écoute réciproque et visant à la compréhension de la situation d'autrui a déjà porté des fruits de bien dans des pays précédemment dévastés par la violence et par les vengeances. Un peu plus de confiance dans l'humanité de l'autre, en particulier s'il souffre, ne peut que donner de bons résultats. Cette disposition intérieure est aujourd'hui invoquée avec raison de nombreuses parts (…).

Dans les circonstances actuelles, marquées par peu de lumières et par trop d'ombres, c'est pour moi un motif de réconfort et d'espérance de savoir que les communautés chrétiennes du Moyen-Orient, dont les souffrances intenses sont bien présentes à mon esprit, continuent à être des communautés vivantes et actives, décidées à témoigner de leur foi avec leur identité spécifique dans les sociétés qui les entourent. Elles désirent pouvoir contribuer de manière constructive à soulager les nécessités urgentes de leurs sociétés respectives et de toute la région.

Dans sa première Lettre, écrivant à des communautés plutôt pauvres et laissées-pour-compte, qui ne comptaient pas beaucoup dans la société de l'époque et étaient également persécutées, saint Pierre n'hésitait pas à dire que leur situation difficile devait être considérée comme une "grâce" (cf. 1, 7-11). En effet, n'est-ce pas une grâce de pouvoir participer aux souffrances du Christ, en s'unissant à l'action avec laquelle Il a pris sur Lui nos péchés pour les expier? Que les communautés catholiques, qui vivent souvent dans des situations difficiles soient conscientes de la puissante force qui provient de leur souffrance acceptée avec amour. C'est une souffrance qui peut changer le coeur de l'autre et le coeur du monde.
J'encourage donc chacun à poursuivre avec persévérance sur son chemin, soutenu par la conscience du "prix" par lequel le Christ l'a racheté (cf. 1 Co 6, 20). Certes, la réponse à la vocation chrétienne personnelle est d'autant plus difficile pour les membres de ces communautés qui sont en minorité et souvent peu significatives par leur nombre dans les sociétés dans lesquelles elles vivent. Toutefois, "la lumière peut être faible dans une maison - écrivirent vos Patriarches dans leur Lettre pastorale de la Pâque 1992 -, mais elle éclaire toute la maison. Le sel est un élément infime dans les aliments, mais c'est lui qui donne la saveur. Le levain est peu de chose dans la pâte, mais c'est lui qui la fait lever et la prépare à devenir du pain". Je fais mienne ces paroles et j'encourage les Pasteurs catholiques à persévérer dans leur ministère, en cultivant l'unité entre eux et en restant toujours proches de leur troupeau. Qu'ils sachent que le Pape partage les angoisses, les espérances et les exhortations exprimées dans leurs Lettres annuelles et dans l'accomplissement quotidien de leurs devoirs sacrés. Il les encourage dans leur effort pour soutenir et renforcer dans la foi, dans l'espérance et dans la charité le troupeau qui leur a été confié. Leur présence dans les communautés des divers pays de la région constitue, entre autres, un élément qui peut grandement favoriser l'oecuménisme.

Depuis longtemps on observe que de nombreux chrétiens quittent le Moyen-Orient, si bien que les Lieux Saints risquent de devenir des sites archéologiques, privés de vie ecclésiale. Certes, des situations géopolitiques dangereuses, des conflits culturels, des intérêts économiques et stratégiques, ainsi qu'une agressivité que l'on cherche à justifier en lui attribuant une origine sociale ou religieuse, rendent difficile la survie des minorités et c'est pourquoi de nombreux chrétiens sont conduits à céder à la tentation d'émigrer. Souvent le mal peut être d'une certaine manière irréparable. N'oublions pas, toutefois, que même le simple fait d'être proches et de vivre ensemble une souffrance commune agit comme un baume sur les blessures et dispose à des pensées et des oeuvres de réconciliation et de paix. Il en naît un dialogue familier et fraternel qui, avec le temps et la grâce de l'Esprit, pourra se transformer en un dialogue à un niveau plus large : culturel, social et même politique. Le croyant sait d'ailleurs qu'il peut compter sur une espérance qui ne déçoit pas, parce qu'elle se fonde sur la présence du Ressuscité. C'est de Lui que vient l'engagement dans la foi et l'activité dans la charité (cf. 1 Th 1, 3). Dans les difficultés, même les plus douloureuses, l'espérance chrétienne atteste que la résignation passive et le pessimisme sont le véritable grand danger qui menace la réponse à la vocation qui naît du Baptême. Il peut en dériver de la défiance, de la peur, de la commisération sur soi-même, du fatalisme et la fuite.

A l'heure présente, il est demandé aux chrétiens d'être courageux et déterminés avec la force de l'Esprit du Christ, en sachant pouvoir compter sur la proximité de leurs frères dans la foi, présents à travers le monde. Saint Paul, écrivant aux Romains, déclare ouvertement qu'il n'y a rien de commun entre les souffrances que nous supportons ici-bas et la gloire qui nous attend (cf. 8, 18). De même, saint Pierre dans sa première Lettre nous rappelle que nous chrétiens, même affligés par diverses épreuves, nous avons une espérance plus grande qui nous remplit le coeur de joie (cf. 1, 6). Saint Paul affirme encore avec conviction dans sa seconde Lettre aux Corinthiens, que le "Dieu de toute consolation [...] nous console dans toute notre tribulation, afin que, par la consolation que nous-même recevons de Dieu, nous puissions consoler les autres en quelque tribulation que ce soit" (1, 3-4). Nous savons bien que la consolation promise par l'Esprit Saint n'est pas faite simplement de bonnes paroles, mais qu'elle se traduit par un élargissement de l'esprit et du coeur, afin de pouvoir voir sa propre situation dans le cadre plus large de toute la Création soumise aux douleurs de l’enfantement en attente de la révélation des fils de Dieu (cf. Rm 8, 19-25). Dans cette perspective, chacun peut arriver à penser davantage aux souffrances de l'autre qu'aux siennes, davantage aux souffrances communes qu'aux souffrances privées, et à se préoccuper de faire quelque chose pour que l'autre ou les autres comprennent que leurs souffrances sont comprises et accueillies et que l'on souhaite, autant que faire se peut, leur apporter un remède.



Lire le texte intégral du Message du Pape Benoît XVI 

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Publié par Matthieu BOUCART -
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commentaires

L
       Je vérifie actuellement exactement ce que notre Pape dit du pessimisme, (alors que je sors d'une pèriode de crise et de découragement ),les lectures de ce jour me confirment la joie que je ressens à nouveau de me mettre au service du Seigneur et d'être appuyée sur Lui comme à un soutien infaillible et constant par Sa Parole quotidienne qui nous rejoint et le Don de Lui-même dans Son Trés Saint Sacrement!Je te remercie du soutien que je trouve ainsi par ton blog et celui du père Covens , car Le Seigneur m'y attend et attend de la même manière chacun quand notre désir est de Le chercher en vérité, c'est l'oeuvre magnifique de Son Esprit, père de nos âmes, qui ne nous laisse jamais orphelins.Fraternellement. F.
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L
   Bonjour Matthieu,Je réfléchis comment partager de-nouveau. Je n'ai pas de temps pour tenir un blog, je n'en ai plus. Je mets un lien avec le blog de messages actuels qui m'a convertie de nouveau,voilà mon témoignage, en quelque sorte.Avec toute ma sincère fraternité en notre Eglise qui nous nourrie.F.
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L
Bonsoir Matthieu,moi aussi j'ai beaucoup de joie à renouer cette fraternité spirituelle qui m'est nécessaire et l'intérêt constant qu'apporte ton blog,dont je compte "profiter".Je te remercie. A bientôt.En union de prière pour nos missions respectives.F.
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M
Merci Lucienne de ton message! Ca me fait plaisir d'avoir de tes nouvelles.Pour mes lecteurs : la citation sur le pessimisme se trouve ici : http://totus-tuus.over-blog.com/article-2002311.html
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L
Je te remercie ,Matthieu, d'avoir publié cet extrait de notre Pape qui (m')ouvre l'esprit et le coeur à plus d'espérance et de courage. Union de prière fraternelle.p.s; : hier, en voulant accéder à ton blog, je suis arrivée sur une citation concernant le pessimisme, justement ! J'en avais bien besoin pour retourner à la mission (nous en avons tous une du moment que nous voulons être unis profondément à Jésus)Bonne et heureuse fête du Sacré-Coeur à chacun, Lui qui nous relève de nos peurs, et de nos découragements !
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