6 mars 2008 4 06 /03 /mars /2008 12:54

Extrait du discours prononcé le 9 octobre 2006 par le Pape Benoît XVI aux Evêques du Canada-Occidental en visite ad limina.

Chers frères dans l'épiscopat,

"Il fallait bien festoyer et se réjouir [...] il est revenu à la vie ; il était perdu et il est retrouvé"
(Lc 15, 32).

La parabole du fils prodigue est l'un des passages les plus appréciés de l'Ecriture Sainte. Sa profonde illustration de la miséricorde de Dieu et l'important désir humain de conversion et de réconciliation, ainsi que la restauration des relations brisées, parlent aux hommes et aux femmes de tous âges. La tentation de l'homme d'exercer sa liberté en prenant de la distance par rapport à Dieu est fréquente. Or l'expérience du fils prodigue nous fait constater à la fois dans l'histoire et dans nos propres vies que, lorsque la liberté est recherchée en dehors de Dieu, le résultat est négatif : perte de la dignité personnelle, confusion morale et désintégration sociale. Cependant, l'amour passionné du Père pour l'humanité est vainqueur de l'orgueil humain. Prodigué gratuitement, c'est un amour qui pardonne et qui conduit les personnes à entrer plus profondément dans la communion de l'Eglise du Christ. Il offre vraiment pour tous les peuples l'unité en Dieu et, comme cela est parfaitement manifesté par le Christ sur la croix, il réconcilie justice et amour (cf.
Deus caritas est, n. 10).

Et que dire du frère aîné? Ne représente-t-il pas, dans un certain sens, également, tous les hommes et toutes les femmes ; peut-être en particulier ceux qui s'éloignent tristement de l'Eglise? Sa manière de rationaliser sa propre attitude et ses propres actions suscite une certaine sympathie, et pourtant, en dernière analyse, elle illustre son incapacité à comprendre l'amour inconditionnel. Incapable de penser au-delà des limites de la justice naturelle, il demeure pris au piège de l'envie et de l'orgueil détaché de Dieu, isolé des autres, et mal à l'aise avec lui-même.

Chers frères, tandis que vous réfléchissez sur les trois personnages de cette parabole – le Père dans son abondante miséricorde, le fils cadet dans sa joie d'être pardonné, et le fils aîné dans son isolement tragique – soyez confirmés dans votre désir d'affronter la perte du sens du péché, que vous avez évoqué dans vos comptes-rendus. Cette priorité pastorale reflète l'espérance ardente que les fidèles fassent l'expérience de l'amour infini de Dieu comme un appel à renforcer leur unité ecclésiale et à surmonter la division et la fragmentation qui, si souvent, blessent les familles et les communautés d'aujourd'hui. De ce point de vue, la responsabilité de l'Evêque d'indiquer la présence destructrice du péché est déjà envisagée comme un service d'espérance : elle renforce les croyants afin qu'ils évitent le mal et choisissent la perfection de l'amour et la plénitude de la vie chrétienne. Je désire donc louer votre promotion du sacrement de la Pénitence. Tandis que ce sacrement est souvent considéré avec indifférence, ce qu'il produit est précisément la plénitude de la guérison à laquelle nous aspirons. Une appréciation renouvelée de ce Sacrement confirmera que le temps passé au confessionnal sépare le mal du bien, fait renaître la vie après la mort et révèle à nouveau le visage miséricordieux du Père.

Comprendre le don de la réconciliation exige une réflexion attentive sur les moyens de susciter la conversion et le repentir dans le coeur de l'homme (cf.
Reconciliatio et paenitentia, n. 23). Tandis que les manifestations du péché abondent – l'avidité et la corruption, les rapports corrompus par la trahison et l'exploitation des personnes – la reconnaissance de la culpabilité individuelle a diminué. Derrière l'affaiblissement de la reconnaissance du péché, avec le besoin moins fréquent de demander le pardon qui en découle, se trouve en définitive l'affaiblissement de notre relation avec Dieu (cf. Discours lors des Vêpres oecuméniques, Ratisbonne, 12 septembre 2006).

Il n'est pas surprenant de constater que ce phénomène est particulièrement prononcé dans les sociétés marquées par une idéologie séculière post-illuministe. Là où Dieu est exclu de la sphère publique, le sens de l'offense contre Dieu – qui est le véritable sens du péché – disparaît, de même que lorsque la valeur absolue des normes morales est relativisée, les catégories du bien et du mal disparaissent avec la responsabilité individuelle. Pourtant, le besoin humain de reconnaître et d'affronter le péché ne disparaît jamais vraiment, quels que soient les efforts d'une personne, comme ici, le frère aîné, à rationaliser le contraire. Comme nous le dit saint Jean : "Si nous disons : "nous n'avons pas péché", nous nous abusons" (1 Jn 1, 8). Cela fait partie intégrante de la vérité sur la personne humaine. Lorsque le besoin de demander pardon et la disponibilité à pardonner sont oubliés, apparaît à leur place une culture inquiétante de blâme et de litiges. Mais ce phénomène horrible peut être éliminé. Suivre la lumière de la vérité réconfortante du Christ signifie dire avec le père : "Toi mon enfant, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi" et nous devons nous réjouir "puisque ton frère [...] était perdu et il est retrouvé" (Lc 15; 31-32).

(…) L'engagement à la vérité ouvre la voie à la réconciliation durable à travers le processus de guérison qui consiste à demander et à accorder le pardon – deux éléments indispensables pour la paix. De cette façon, notre mémoire est purifiée, nos coeurs sont rassérénés, et notre avenir est empli d'une espérance bien fondée sur la paix qui jaillit de la vérité.



Lire le texte intégral du discours du Pape

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Publié par Matthieu BOUCART -
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commentaires

M
Il n'y a qu'à voir l'état actuel de notre société pour vérifier la pertinence de l'analyse du Pape...Ce que veut exprimer le Saint Père, me semble-t-il, c'est que l'athéisme conduit inexorablement au relativisme moral. Si Dieu n'est plus ma référence, et si sa Parole de vie n'est plus ma boussole, alors je suis "perdu". Cela ne signifie pas que je vais perdre toute notion du bien et du mal (ces notions sont profondément enracinées dans mon être - le fameux Juge intérieur...), mais voilà : je vais me forger moi-même ma morale sur-mesure, selon mes convictions personnelles qui ne seront sans doute pas celles du voisin. Dans un société athée, on se voit contraint alors d'abandonner à la majorité le soin de définir ce qui est bien et ce qui est mal, au nom de la démocratie et de la liberté, et au final, on en vient à légaliser l'élimination massive de millions d'êtres humains par l'avortement (et demain peut être par l'euthanasie)..."Je suis la lumière du monde, dit Jésus. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, il aura la lumière de la vie" (Jn 8. 12).
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W
"lorsque la liberté est recherchée en dehors de Dieu, le résultat est négatif : perte de la dignité personnelle, confusion morale et désintégration
sociale."Bien sûr que la liberté existe en dehors de Dieu. La croyance ou l'incroyance est une conviction personnelle et n'a rien a voir avec sa morale. Dire que quelqu'un qui ne croit pas en Dieu est condamné à la confusion morale et à la désintégration sociale, n'est ni tolérent, ni juste pour les athés.
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